Alerte Otan n° 59 - Janvier 2016
Bombarder Rakka ou bien Molenbeek?

Cette semaine [suivant les attentats du 13-11-2015 à Paris], grande indignation  autour de certains propos d'Eric Zemmour. Au delà de la discussion sur le second degré, cela met bien en lumière une espèce de non-dit : quasi tout le monde politico-médiatique applaudit de toutes ses mains à l'annonce des bombardements français sur Raqqa. C'est très normal d'aller bombarder une quelconque cité d'un de ces pays barbares, comme l'Occident le fait depuis 2001 (au moins) - mais tollé si on évoque que ces villes pourraient être sur le même pied qu'une cité d'Occident.

Ce que Zemmour dit au début de son billet (avant le nécessaire couplet anti-Islam), ça ne va peut-être pas très loin, mais on aimerait l'entendre davantage dans les grands médias :

«  "La guerre!" dit Hollande. "La guerre!" dit Vals. "La guerre!" dit Caseneuve. "Une guerre impitoyable", dit Hollande, "que nous allons gagner", dit Vals, "notre guerre", disent les médias! La guerre pour jouer au chef de guerre, la guerre pour appeler à l'unité nationale, la guerre pour remonter dans les sondages...

La guerre : quelques bombardements de plus ou de moins dans une Syrie transformée en terrain vague. Une guerre française dans les fourgons de l'armée américaine. Une guerre en Syrie, qui s'ajoute à celle d'Irak, ou d'Afghanistan, ou de Libye, qui ont aggravé le mal qu'elles étaient censé annihiler. Des guerres aux côtés de l'Arabie Saoudite, du Qatar, de la Turquie, qui ont fabriqué, équipé, financé la milice de Daesh, comme ils avaient fabriqué, financé, équipé al-Qaida [Afghanistan, 80'], avec la bénédiction des services secrets de l'Oncle Sam . »

Si vraiment "nous sommes en guerre", alors les bombes tombent des deux côtés. La Syrie est en guerre, là oui, une guerre délibérément provoquée et attisée par les pays Occidentaux. Au-delà du soutien revendiqué aux bandes armées ‘modérées', la guerre dans laquelle est plongée la Syrie est la suite directe et prévisible des destructions de l'Afghanistan, de l'Irak et de la Libye, sur les responsabilités desquelles ont garde le silence complet.

Sans doute y a-t'il aujourd'hui quelques dizaines de soi-disant ‘jihadistes' qui frappent Paris et demain sans doute Bruxelles. Ce n'est pas ‘la guerre', mais un ‘dommage  collatéral' très prévisible de notre politique depuis des décennies.

En Syrie, ce sont au moins 30.000 jihadistes étrangers qui ont été envoyés s'abattre sur ce pays.

Roland Marounek