Le non à la constitution européenne est aussi un non à l’OTAN !


30 juin 2005

Comme tant d’autres citoyens et associations progressistes de Belgique, le CSO s’est réjoui des victoires successives du non aux référendums français et néerlandais sur la Constitution européenne, ainsi que de la forte participation qui a caractérisé les deux scrutins. Cette victoire est d’autant plus remarquable que la grande majorité des médias et des élus politiques avaient mené campagne pour l’approbation du traité constitutionnel. Ce résultat démontre avec éclat que nos sociétés ne sont pas aussi lobotomisées par la « pensée unique » que certains le pensaient.

Les motivations des électeurs français et hollandais, dans leur grande majorité, expriment un rejet de la dérive ultralibérale de l’Europe ces quinze dernières années et le sentiment que la sacralisation du marché et la concurrence mène nos sociétés dans une impasse. En Belgique, grâce à nos partis socialistes et chrétiens-humanistes, la population ne sera pas consultée sur un texte qui, s’il prenait force de loi, déterminerait en profondeur l’avenir des prochaines générations.

Si les questions sociales et économiques ont été au centre des débats qui ont agité nos voisins, d’autres problématiques n’en ont pas été absentes pour autant. Parmi les arguments les plus fallacieux des tenants du oui, celui de l’indépendance de l’Europe face aux Etats-Unis que garantirait cette Constitution est un des plus mensongers. En effet, selon son article I-41, la « politique de sécurité et de défense commune » de l’Union « respecte les obligations » découlant de l’adhésion à l’OTAN de certains de ses membres et est « compatible » avec la politique de défense de l’Alliance atlantique. Autrement dit, la Constitution coule dans le bronze la mainmise des Etats-Unis sur la défense européenne.

En outre, et cela devrait interpeller tous les mouvements de paix, le même article enjoint aux Etats membres d’« améliorer progressivement leurs capacités militaires ». Le projet de traité ne dit rien d’éventuelles mesures de désarmement, à part celles à imposer aux autres, alors que l’Union compte deux puissances nucléaires et que des centaines de bombes nucléaires états-uniennes sont déployées en Belgique et dans d’autres Etats-membres. Seule la croissance des « capacités militaires » est envisagée, alors que les dépenses militaires mondiales ont, pour la première fois en 2004, passé la barre des 1.000 milliards de dollars. Dans ce total, la part des 25 membres du club européen est de 225 milliards, plus de 4 fois les dépenses militaires de la Chine et de la Russie réunies, mais moins de la moitié de celles des Etats-Unis qui ont consacré à leur armée et aux multinationales de l’armement près de la moitié des dépenses militaires de la planète1. Quant à la part des 26 pays membres de l’OTAN, elle en représente près de 72 %, alors que leur population ne constitue qu’un bon dixième de la population mondiale.

Le monde n’a jamais connu de bloc militaire aussi puissant et surarmé, qu’il soit européen ou atlantique. Plutôt que de demander son renforcement, n’est-il pas plus urgent d’exiger son désarmement et sa dissolution ? Un projet européen qui placerait parmi ses priorités de telles exigences serait à coup sûr plus mobilisateur et porteur d’avenir que l’imbuvable texte qui vient d’être magistralement désavoué.

1. 47 %, pour être précis Tous les chiffres cités dans ce paragraphe proviennent du SIPRI Yearbook 2005 ou ont été calculés sur base des données qui y sont publiées.