Compte rendu rédigé par Andy Wilcoxson
1 avril 2005
Le 2 mars 2005, le témoin vedette a été Dietmar Hartwig, qui a été le chef de la Mission de contrôle de l'Union européenne (EUMM) au Kosovo de novembre 1998 au 19 mars 1999, jour où la mission a été évacuée en raison du bombardement imminent de l'OTAN. M. Hartwig est un officier de l'armée allemande et est récemment rentré d'une mission à Kaboul. M. Hartwig était le contrôleur en chef au Kosovo. Tous les contrôleurs de l'Union européenne au Kosovo relevaient de son autorité. Il était en contact régulier avec Ibrahim Rugova et d'autres leaders albanokosovars, y compris le commandement et le personnel de l'UCK. Il était aussi en contact avec les autorités serbes et yougoslaves, les journalistes internationaux et locaux, et les différentes organisations non-gouvernementales (ONG).
Dans sa fonction de direction, son travail consistait a rédiger des rapports quotidiens, hebdomadaires et mensuels sur la véritable situation sur le terrain, à l'intention de l'Union européenne. Pour exécuter ce travail, il disposait des rapports faits par les contrôleurs de l'UE sur le terrain, ainsi que de ses propres contacts et expériences. Quand l'EUMM a été évacuée avant l'agression de l'OTAN, M. Hartwig est retourné en Allemagne. Il a été choqué par la couverture médiatique de ce qui se passait au Kosovo. Il a dit au tribunal qu'il y avait une massive contradiction entre la réalité sur le terrain et ce que rapportaient les médias. Pendant son séjour au Kosovo, il a eu l'occasion de constater comment les médias et certaines ONG occidentales faisaient des récits inexacts. Il est allé personnellement au stade de Pristina quand il a été informé de reportages affirmant que les Serbes y avaient installé un camp de concentration pour des prisonniers albanais. Il a témoigné qu'il n'y avait trouvé aucune trace de camp. Une autre fois, les Serbes ont été accusés d'avoir massacré des Albanais à Srbica et d'avoir enterré les cadavres dans un charnier. M. Hartwig s'est rendu sur place et a constaté que 40 Albanais avaient en effet été tués, mais pas par les Serbes. Un témoin oculaire lui a confirmé que les Albanais s'étaient entretués dans un règlement de comptes.
M. Hartwig a affirmé que l'UCK provoquait des affrontements et que l'armée yougoslave et la police serbe ne faisait que répondre aux provocations. Selon son avis, la riposte serbe toujours été menée de façon disciplinée. Le témoin a expliqué combien l'avait préoccupé le fait que ses rapports sur la situation au Kosovo envoyés aux différentes capitales européennes ne se reflétaient pas dans les publications des gouvernements concernés. Il a déclaré que quand il avait pris ses fonctions de chef de la mission, ses collègues lui avaient dit qu'il y avait une contradiction permanente entre ce qui était rapporté aux gouvernements européens et ce que ces gouvernements disaient à leurs peuples. Selon les informations qu'il avait reçues en tant que chef de l'UEMM au Kosovo, M. Hartwig a dit qu'il y avait eu plus d'Albanais tués par d'autres Albanais que par les forces serbes. Il a déclaré au tribunal qu'il n'y avait absolument aucune raison pour l'OTAN d'intervenir contre les Serbes en 1999. M. Hartwig a dit que les histoires d'atrocités serbes perpétrées sur les Albanais avaient été inventées pour fournir à l'OTAN un motif d'attaquer la Yougoslavie. Il a dit que les médias avaient diabolisé les Serbes pour satisfaire les besoins de politiciens qui voulaient attaquer la Yougoslavie. Le témoin a accusé les médias d'avoir failli à leur mission de rendre les politiciens responsables. Selon lui, les médias se sont conduits comme les valets des politiciens. Il les a accusés de comptes rendus tendancieux et inexacts sur la situation au Kosovo. Ils ont relayé toutes les horreurs racontées par les Albanais sur les Serbes sans les vérifier, parce qu'ils voulaient fournir à l'OTAN le prétexte de l'agression.
Pendant toute la durée de son séjour au Kosovo, jusqu'à son évacuation cinq jours avant l'agression de l'OTAN, M. Hartwig n'a jamais vu ou été informé de cas de forces de sécurité serbes expulsant des Albanais de leurs foyers. Il n'a pas non plus été informé d'autres exactions pratiquées par les militaires ou les policiers serbes à l'encontre des Albanais.
M. Hartwig, en tant que chef de l'UEMM au Kosovo, était en contact régulier avec les leaders à la fois serbes et albanais. Il a témoigné que les Serbes recherchaient une solution pacifique qui fût équitable pour tout le monde, alors que les Albanais voulaient établir un Kosovo mono-ethnique dominé par les Albanais qui pourrait se joindre à l'Albanie. Il a dit que les Albanais parlaient de l'ouest de la Macédoine comme de la "partie macédonienne de l'Albanie" et du sud du Monténégro comme de la "partie monténégrine de l'Albanie". Il a affirmé qu'un leader albanais lui avait dit que les Albanais voulaient un Kosovo "sans les Serbes" et pas "sous les Serbes", en d'autres termes que l'intention des Albanais était de se débarrasser des Serbes et de faire sécession de la Serbie.
M. Hartwig a décrit l'UCK comme une armée clandestine dont les activités étaient dirigées contre la paix, et contre les négociations de paix. C'est elle qui provoquait toujours les affrontements. Il a affirmé sans équivoque que l'armée yougoslave et la police serbe n'avaient jamais provoqué des combats. Il a ajouté que l'armée et la police se restreignaient dans leurs ripostes aux attaques de l'UCK. Il a dit que le général Lukic prenait grand soin de se conformer à l'accord Holbrooke-Milosevic pour que les Serbes ne puissent pas être accusés de négocier de mauvaise foi. M. Hartwig a déclaré que la police serbe faisait de son mieux pour protéger les vies de civils. Il a témoigné qu'il n'avait jamais reçu de rapports faisant état d'agressions serbes contre des civils. Il y avait des cas où des civils avaient été pris dans des échanges de tirs entre la police et l'UCK, mais c'était toujours l'UCK qui initiait les combats en prenant la police en embuscade. Selon le témoin, le Haut commissariat des Nations Unies aux réfugiés (UNHCR) exagérait le nombre de réfugiés au Kosovo. A une occasion, il a fait état d'un groupe de 3.000 réfugiés près de la frontière macédonienne. Quand les contrôleurs de l'EUMM sont arrivés pour vérifier, ils n'en ont trouvé que 400. A d'autres moments, le UNHCR affirmait qu'un certain nombre de réfugiés avait fui d'un village donné, et le chiffre avancé était deux ou trois fois supérieur au nombre d'habitants du village.