Claudine Pôlet
6 novembre 2007
Dans une Belgique qui se déchire de plus en plus, les problèmes dits institutionnels et de relations entre la communauté française et flamande prennent le dessus sur toute autre question politique. Se préoccuper, maintenant, d’une question de bouclier antimissiles qui n’existe pas encore en Europe et encore moins sur notre territoire, peut sembler aussi… surréaliste.
Et pourtant, l’annonce et le début de mise en place par l’Administration Bush de ce système anti-missiles est en train de pousser le monde vers la guerre, de relancer une course folle aux armements, il nous concerne donc grandement !
La presque totalité des partis politiques de Belgique, qu’ils participent de la coalition orange bleue ou dans l’opposition, se divisent à qui mieux mieux, régionalisent, fédéralisent, séparatisent… mais conservent une étrange communauté de positions sur les questions de politique extérieure et de défense de notre pays. Même le NVa, l’allié séparatiste du CD&V déclare que l’armée et la politique extérieure peuvent rester du ressort d’un Etat Belge. Et tous se rangent derrière la Note Leterme concernant la Défense et la Politique extérieure ou, en tout cas, se taisent à son sujet. Cette note réaffirme que la Belgique est liée à une politique européenne de sécurité et de défense et qu’elle est un fidèle et loyal membre de l’Alliance Atlantique, à laquelle elle est prête à accroître sa contribution.
Rappelons également que le mini-traité européen appelé à remplacer le projet de Constitution européenne, reprend textuellement les chapîtres qui bétonnaient l’allégeance à l’OTAN. Il y rajoute la nécessité d’accroître les efforts financiers de chaque Etat membre pour rendre les forces militaires plus efficaces.
L’OTAN n’en est pas à une « étude de faisabilité » toute théorique. Des dossiers de milliers de pages circulent parmi les cercles dirigeants. Le secrétaire général Joop de Scheffer propose avec persistance qu’un bouclier antimissiles otanien pourrait très bien compléter le système américain. L’OTAN se prépare à une participation effective et importante à l’installation du bouclier antimissiles.
La Belgique est aussi concernée par cette question. Et comme nos gouvernements et nos responsables politiques, tous partis confondus, ont évité et évitent de plus en plus tout débat démocratique sur les questions militaires, il y a fort à parier que le projet de bouclier antimissiles deviendra une réalité otanienne à bref délai, et que tout cela passera au-dessus de la tête des citoyens et sera discuté et voté dans la plus grande discrétion. On en a déjà assez avec les bombes nucléaires de Kleine Brogel qui sont toujours là malgré les résolutions unanimes du Parlement pour les faire partir. Si les grands stratèges des Affaires Etrangères et de la Défense y rajoutent un soutien au système antimissiles, c’est une preuve de plus que ces bombes atomiques sont destinées à être utilisées, protégées par un bouclier antimissiles. Cela ne doit pas se passer !
Le bouclier antimissiles est un outil de guerre et non de défense. Sous le contrôle des Etats-Unis ou un contrôle partagé avec l’OTAN, ou même avec une implication de l’Union Européenne, il est totalement inacceptable. Le Président Bush l’a présenté comme une protection nécessaire à l’Amérique et à l’Europe contre des menaces de pays qualifiés de voyous, et en particulier l’Iran. Mais l’Iran n’est pas en mesure d’attaquer ni l’Amérique ni l’Europe avec des missiles nucléaires à longue portée qu’elle ne possède pas.
Ce bouclier antimissiles vise à pouvoir attaquer la Russie et la Chine ainsi que n’importe quel pays, qui résiste à la prédominance des USA et de l’Alliance Atlantique, sans risquer une riposte de ceux qui ont la capacité nucléaire de le faire, comme la Russie et la Chine. Aucun de ces pays ne cherche des conquêtes militaires. L’intérêt du peuple de Belgique et de toute l’Europe est de rechercher une coopération avec eux et non la guerre. Voilà bien pourquoi il n’est pas question pour les citoyens de notre pays et des pays membres de l’Otan d’accepter une participation à cette escalade vers une nouvelle guerre mondiale.