Roland Marounek
30 décembre 2008
« On doit accorder les MAP [le Plan d'Action pour l'Adhésion à l'Otan] à l'Ukraine et à la Géorgie, et il n'y a pas de marchandage, point final. » Georges Bush, 1er avril 2008, à la veille du sommet de Bucarest.
« Il n'est pas nécessaire en ce moment de discuter du MAP » Condoleeza Rice, 26 novembre 2008, peu avant la réunion de Bruxelles qui devait initialement entériner l'entrée de ces pays dans cet antichambre de l'Otan.
Le revirement est pour le moins assez sensible. Et la marche triomphale de l'Otan vers l'Est et l'encerclement de la Russie semble connaître quelques ratés. Même si l'administration US par la voix de Condoleeza Rice affirme qu'il ne s'agit pas de remettre en question l'objectif final de l'adhésion, il semble assez clair que cet objectif est devenu beaucoup plus lointain et incertain. « Je pense qu'il est juste de prédire qu'il n'y aura pas d'offre d'adhésion à l'Otan pour ces pays pendant quelques années. » précise un autre officiel US.
Le MAP, qui accorde un statut de candidat officiel à l'Otan, a été troqué contre un plan annuel de coopération. Mais quel qu'en soit son contenu concret, l'essentiel est ici qu'une confrontation directe avec la Russie par solidarité atlantique automatique n'est plus pour l'instant d'actualité.
Poker raté en Ossétie.
Entretemps il y a eu l'aventure désastreuse de Saakhashvili en Ossétie du Sud. Du côté d'au moins une partie de l'administration US et de ses relais otaniens, l'un des objectifs de cette agression était de ressouder l'Alliance atlantique derrière les USA contre une menace russe "sovietoïde". La machine médiatique avait pourtant été bien lancée, mais elle a tourné rapidement dans le vide. Les déclarations belliqueuses de certains responsables otaniens n'ont finalement eu aucun effet, et les navires de guerre US déployés en mer Noire sont rentrés chez eux.
Ce fiasco aura servi de révélateur de la faiblesse profonde des USA et de ses alliés, et de celle des USA envers ses alliés. A l'intérieur même de l'Alliance Atlantique, les USA ne sont plus en mesure d'imposer leur volonté. Le parrain s'affaiblit, les second couteaux se montrent plus arrogants...
Le piège afghan.
On l'a assez répété, l'Afghanistan devait être un succès pour l'Otan. Comme disait son secrétaire général de Hoop Scheffer « l'avenir de l'Otan [y] est en jeu ».
Ce merveilleux succès semble pour le moment assez compromis. Les récentes attaques contre les convois d'approvisionnement au Pakistan soulignent la grande vulnérabilité de l'Otan et son extrême dépendance à la bonne volonté de la Russie, qui avait menacé lors de la crise géorgienne de suspendre la coopération sur l'Afghanistan. L'Otan est actuellement en train de chercher une troisième voie d'approvisionnement via la Géorgie, l'Azerbaïdjan, le Kazakhstan et l'Ouzbékistan, mais en attendant cette très éventuelle solution, la voie russe est vitale. Autrement dit, la Russie tient avec l'Afghanistan l'Otan à la gorge.
L'Otan n'est plus en position de force. En Ukraine, les anciens alliés de la soi-disant révolution orange se déchirent, et certains commencent à se tourner du côté où c'est le plus avantageux, et ce ne sont déjà plus les États-Unis et l'Otan.
L'avenir de l'Otan est en jeu, - et la partie n'est pas gagnée....