Pierre Piérart
1 juillet 2010
La révision du Traité de Non Prolifération (TNP) de 2010 s’est tenue à New York au siège des Nations Unies, du 2 au 29 mai. Les médias n’en ont pas parlé probablement parce que le gouvernement belge et l’Union Européenne se désintéressent de ce problème politiquement embarrassant pour eux. Pour certains spécialistes il s’agit d’un verre à moitié vide et pour d’autres d’un verre à moitié rempli. En réalité les conclusions de cette importante révision sont lamentables. Pour être bref nous soulignerons les points suivants :
1) Les cinq puissances nucléaires reconnues, c’est-à-dire celles qui se sont dotées de l’arme nucléaire avant 1968 (date du TNP entré en vigueur en 1970) n’ont pas changé de position et ont clairement refusé de s’engager dans une convention de désarmement nucléaire qui, accompagnée d’un agenda précis, aurait dû aboutir à un désarmement nucléaire total en 2020. Cette proposition quelque peu utopique était pourtant devenue indispensable vu les préparatifs de guerre des Etats-Unis et d’Israël contre l’Iran. Les Etats-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne, la France et la Chine, membres permanents du Conseil de Sécurité, dotés du droit de véto, n’ont néanmoins pas daigné s’engager à amorcer un désarmement nucléaire. Certains diront que l’accord de désarmement entre Etats-Unis et Russie constitue un premier pas ; en réalité ce dernier consiste à se débarrasser d’armes obsolètes et, le comble, à réaliser des recherches pour des armes nucléaires plus sophistiquées.
2) Les Etats-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne et la France, refusent le « no first use » (usage en premier). Seule la Chine s’engage à ne pas utiliser l’arme nucléaire à titre préventif, c’est-à-dire pour défendre ses intérêts stratégiques.
3) Aucun engagement n’a été pris par les puissances nucléaires (sauf peut-être par la Chine) pour débarrasser l’Europe de ses armes nucléaires tactiques (+/- 250 bombes B-61 déployées en Allemagne, en Belgique, en Italie, aux Pays-Bas et en Turquie).
4) Il en est de même pour la Corée du Sud et l’île d’Okinawa (Japon), où des armes nucléaires sont entreposées.
5) Le désarmement nucléaire du Moyen Orient a été envisagé et une conférence serait prévue en 2012 pour examiner cette question au grand dam d’Israël qui, dans le Proche et le Moyen Orient, est le seul pays qui détient de 200 à 300 têtes nucléaires. La présence d’armes de destruction massive est la cause d’une déstabilisation très grave dans ces territoires. Cette conférence a été demandée par le Secrétaire général de l’ONU en accord avec tous les pays de la région.
En conclusion la Conférence réaffirme l’engagement très virtuel des états nucléaires pour programmer l’élimination totale de leurs armes nucléaires, ce qui permet à ces puissances de prétendre qu’ils respectent l’article 6 du TNP ! Cette déclaration a été proclamée à chaque révision du Traité, c’est-à-dire qu’on répète depuis 40 ans que l’on va respecter l’article 6 sans jamais l’accompagner d’un agenda. Le président Obama n’a-t-il pas dit qu’il ne verrait pas de son vivant la disparition de cette arme de destruction massive qui prolifère de plus en plus, principalement dans les pays qui ont pris conscience que se doter d’une telle arme pourrait leur être utile sur le plan de la sécurité ?
La Conférence a également demandé aux puissances nucléaires un rapport en 2014 sur les décisions à prendre pour enfin faire un pas décisif à l’occasion de la révision de 2015. Des promesses gratuites qui permettent aux puissances nucléaires de dormir sur leurs deux oreilles puisque rien ne leur est demandé avant cette date. En ce qui concerne le gouvernement belge et l’Alliance atlantique soyons cyniques et faisons-nous l’avocat du diable : supprimons Kleine Brogel dont les multiples missions et infrastructures nucléaires coûtent 585 millions d’euros par an. Des économies substantielles qui seraient bien utiles pour colmater le déficit belge et même pour l’Otan qui exige de ses membres, avec insistance, des contributions plus importantes pour son engagement en Afghanistan …..