6 août 2011
AMPGN – Association Médicale pour la Prévention de la Guerre Nucléaire
CEAH – Centre d'Ecologie Appliquée du Hainaut
CNAPD – Coordination Nationale d'Action pour la Paix et la Démocratie
COLUPA – Coordination Luxembourgeoise pour la Paix
CSO – Comité de Surveillance OTAN
EUROPEFORPEACE
MCP – Mouvement Chrétien pour la Paix
MIR-IRG – Mouvement International de Résistance à la Guerre
VREDE
VREDESACTIE -
ACTION POUR LA PAIX
Rédaction et coordination : Michel Wautelet, Marcel Poznanski, Philippe de Salle, Macha Re-Piérart
Le 6 août 1945, l'humanité est entrée dans l'ère nucléaire par un événement dramatique : Hiroshima et ses dizaines de milliers de morts directs et encore plus d'indirects et autres victimes. Cette explosion a marqué de manière indélébile l'opinion des citoyens du monde sur le nucléaire. Depuis lors, la menace nucléaire plane sur notre Terre. Les accidents civils de Three Miles Island, Tchernobyl et Fukushima en sont la partie visible. Même si, aujourd'hui, l'actualité nucléaire militaire n'est plus dans les médias, la menace est toujours bien présente. L'arrivée du terrorisme et les révélations récentes sur le nucléaire civil viennent malheureusement compliquer le problème, et n'aident pas à la diminution du risque. Bien au contraire !
La situation actuelle peut être séparée en trois parties, interdépendantes : militaires, civiles et terroristes.
Le nucléaire militaire a connu son apogée à la fin des années 1980, lorsque les arsenaux nucléaires militaires américain et soviétique étaient, respectivement, de 23.000 et 39.000 têtes nucléaires, auxquels s'ajoutaient ceux, officiels, de la France, de la Grande-Bretagne et de la Chine. Depuis lors, suite aux traités START et SORT, les arsenaux des deux grandes puissances nucléaires devraient être de l'ordre de 1.550 têtes nucléaires chacune. Avec, en Europe, un stock actuel d'environ 200 têtes nucléaires, dont 14 à 20 en Belgique, à Kleine Brogel. Mais, en même temps, plusieurs pays ont acquis, plus ou moins discrètement, l'armement nucléaire : Indes, Pakistan, Israël, Corée du Nord. Depuis Hiroshima et Nagasaki, aucune arme nucléaire n'a heureusement été utilisée. Dans les discours officiels, l'arme nucléaire est d'abord une arme de dissuasion. Pourtant, le président Bush a affirmé que les USA prévoient l'emploi de l'arme nucléaire en première frappe, alors que l'OTAN et ses 28 membres, nucléaires ou pas, ont inscrit la maintien de la stratégie nucléaire dans le « Nouveau Concept stratégique ». Dans les faits, les effets des armes nucléaires sont tellement graves que celui qui fera exploser une telle arme sur un adversaire en payera les conséquences au niveau mondial, en termes de condamnation généralisée. La dissuasion est donc un leurre.
On ne peut non plus négliger l'emploi de l'arme à uranium appauvri qui, si elle n'est pas de la même nature que l'arme nucléaire, pollue pour des millénaires des terres de Yougoslavie, d'Irak, d'Afghanistan, voire probablement de Lybie et ailleurs. Les populations de ces régions souffrent de cette contamination.
Le nucléaire civil, ce sont les réacteurs nucléaires pour la fourniture d'électricité, mais aussi les utilisations médicales et industrielles. La récente catastrophe de Fukushima, au Japon, nous rappelle que le nucléaire civil n'est pas sans risques. Certes, lorsque tout fonctionne bien, il n'y a pas plus de danger qu'avec le rayonnement naturel. Mais l'homme est faillible et ne peut gérer tous les paramètres imprévisibles pour assurer un risque zéro. Une catastrophe reste toujours possible, aux conséquences désastreuses pour des populations nombreuses, pour de longues durées. Les conséquences de Tchernobyl (il y a 25 ans) sont loin d'être terminées. La région de Fukushima devrait être contaminée pendant plusieurs dizaines d'années au moins. Où et quand aura lieu la prochaine catastrophe nucléaire ?
Pas chez nous disent les défenseurs du nucléaire. Nos centrales sont très sûres. C'est en tout cas ce que le secteur nucléaire nous assure depuis longtemps. Pourquoi, alors, craint-on que les plus vieilles centrales nucléaires belges ne réussissent aux stress-tests annoncés cette année ? Quant aux accidents de type chute d'avion, on nous dit que les réacteurs, protégés par deux enceintes de confinement, sont protégés contre des chutes de gros avions. Sauf que, en y regardant de plus près, il apparaît que les plus vieilles centrales seraient susceptibles de résister à la chute d'un Cessna 210 monomoteur de 1,5 tonne et d'un LEAR JET 23 bimoteur de 5,7 tonnes, à une vitesse de 360 km/h. Quant aux plus récents, ils pourraient résister à l'impact d'un avion de chasse militaire. On est loin d'un Boeing 747 de 400 tonnes, dont 100 tonnes de kérozène, à 900 km/h ! Sans oublier qu'une chute d'avion sur la centrale, à côté du réacteur lui-même, peut aussi avoir des conséquences désastreuses. Lorsque l'on se rappelle que les réacteurs nucléaires de Tihange sont dans le prolongement de la piste de l'aéroport de Bierset, d'où décollent et atterrissent, tous les jours, quantité de gros porteurs, il y a de quoi se poser des questions. Nous aurait-on menti sur la sécurité des réacteurs nucléaires ?
Quant à la menace terroriste, elle est évidemment du domaine du secret défense. Et même si la réalisation d'armes nucléaires classiques par des terroristes relève probablement du fantasme, même si les effets d'une arme « sale » (dispersion de matière radioactive par un explosif classique) seraient surtout psychologiques et économiques, la sécurisation du secteur nucléaire, civil et militaire, est une nécessité. Laquelle requiert une culture du secret et une militarisation du secteur nucléaire civil, très éloignées de la transparence demandée d'un peu partout.
Pendant plusieurs décennies, la principale menace du nucléaire provenait des arsenaux nucléaires militaires des grandes puissances de l'époque. On prétendait officiellement que le civil et le militaire étaient bien disjoints. Aujourd'hui, l'analyse des catastrophes de Tchernobyl et de Fukushima indique que le nucléaire civil est moins sûr que proclamé par les défenseurs du nucléaire. Quant aux suites du 11 septembre, elles montrent que, aussi improbable soit-il, le terrorisme nucléaire ne peut être balayé d'un revers de la main. D'uniquement militaire, la menace nucléaire se révèle multiforme.
Face à un incident nucléaire majeur, les hommes sont impuissants, tant les conséquences humaines, économiques, environnementales sont incalculables. C'est pourquoi nous demandons le retrait des armes nucléaires de Belgique et d'Europe, la mise sur pied d'une convention interdisant les armes nucléaires à l'échelle mondiale, un traité mondial d'interdiction de l'emploi militaire de l'uranium appauvri et de déchets nucléaires ainsi qu'un contrôle démocratique du nucléaire civil.