Claudine Pôlet
1 octobre 2012
C’est qui la vraie « communauté internationale » ?
L’Iran, qualifié encore de « menace » et de « pays voyou » dans la Déclaration du sommet de l’Otan à Chicago, présidera le Mouvement des Pays Non Alignés – soit plus de 120 pays membres de l’ONU – pendant les trois prochaines années. Quel camouflet pour nos gouvernements de l’Union Européenne et des Etats-Unis, qui se targuent de représenter « la communauté internationale » ! La réunion des Non Alignés qui vient de se terminer à Téhéran, marque un tournant dans les relations internationales, mettant en évidence la crise dans laquelle s’enfonce l’ONU et est la prémisse de nouveaux grands changements.
Mais pour nous, qui luttons pour une transformation radicale de notre société et contre la guerre il ne s’agit pas de grands jeux géopolitiques, mais bien de voir, de soutenir et de s’inspirer des nouveaux mouvements politiques et sociaux , des luttes des peuples du monde entier, qui sont à la base de ces changements.
Les rapports de forces économiques et sociaux du monde, qui avaient basculé à l’avantage du pouvoir capitaliste dans la période qui a suivi le démembrement de l'URSS et la dissolution du Pacte de Varsovie, connaissent aujourd’hui de nouveaux bouleversements. La liberté totale des multinationales, des grandes puissances économiques et financières, l'hyper concentration des profits, la maîtrise politique et militaire de vastes zones du monde, n’ont conduit qu’à une nouvelle phase de crise du système capitaliste. Les actuels crashs provoqués par la dictature financière ne donnent aucun signe de dépassement depuis 1998 et atteignent le cœur même de l'Union l'Européenne.
L'impérialisme, tout en concentrant les intérêts des grandes multinationales capitalistes, n’a pas d’autre intérêt ni d’autre issue que pousser plus loin les guerres. Il a choisi la razzia, le chaos, la politique de la terre brûlée. L'année passée il y eut le renversement du gouvernement libyen et le meurtre de Kadhafi, la destruction de ce pays. Cette année c’est la Syrie. Et en point de mire il y a de toute façon l'Iran, qui est menacé à chaque moment de destruction, de bombardements ou de cyber-guerre.
Mais l'escalade militaire qui ne rencontrait aucun obstacle depuis la destruction de la Yougoslavie, l'invasion de l'Irak, l'occupation de l'Afghanistan jusqu'à la foudroyante "opération militaire" de l'OTAN pour démolir et recoloniser la Libye, se trouve confrontée aujourd'hui à un obstacle imprévu : la réaction de la Russie et de la Chine, leur veto au Conseil de Sécurité de l’ONU.
L'expérience de la Libye a clairement démontré que l'impérialisme a pour objectif d’étendre la guerre jusqu'à parvenir aux frontières de la Russie et de la Chine. Mais les deux Etats ont déjà annoncé leur décision de détruire n'importe quel bouclier antimissiles que l'impérialisme fabrique et installe, que ce soit en Mer de Chine ou que ce soit aux frontières de l'Europe. Et la Russie maintient fermement son accord militaire - déjà historique - avec l'Iran et la Syrie.
Au sommet de l'OTAN en mai 2012 à Chicago on n’a pas parlé ouvertement de la Syrie. Toutefois, une intervention militaire directe de l'OTAN se discutait dans les coulisses. Cette option circulait dans diverses réunions de gouvernements des membres de l'OTAN préalables à ce sommet. Ils parlaient d’une « opération de type Libye qui allait bientôt se répéter ».
Les tentatives n’ont pas manqué, depuis la constitution des « Amis de la Syrie », la politique de sanctions de l’UE et des Etats-Unis contre la Syrie, la fourniture massive d’appui financier et militaire aux contre-révolutionnaires syriens par l’intermédiaire des gouvernements turc, Arabie saoudite, Qatar, Jordanie, les préparatifs d’une nouvelle « guerre humanitaire ». Et ce n’est certainement pas fini. Il y a cependant une grande indécision des Etats-Unis et de l’UE pour attaquer directement la Syrie.
Des votes contradictoires se sont multipliés dans les diverses assemblées des Nations-Unies. La dernière Assemblée générale a sorti une résolution reprochant au Conseil de Sécurité d’avoir été incapable d'intervenir en Syrie. 12 pays seulement ont voté contre. Certains pays membres des Non Alignés et du BRICS (Coalition informelle entre Brésil – Russie – Inde – Chine – Afrique du Sud) ont voté en sa faveur. Queles semaines plus tard, plusieurs de ces pays se retrouvent à la conférence des Non Alignés, et même Ban Ki Moon.
Les Nations-Unies n'expriment pas l'opinion des peuples, il y a une énorme crise au sein de cet organisme. Nombreux sont les pays qui avaient voté pour des sanctions et des mesures contraignantes contre la Syrie, qui ont soutenu l’inverse à la récente réunion des Non Alignés.
Le front présenté par la présidence iranienne et les délégations des pays de l’ALBA en particulier, a joué un rôle important dans ce sens. Il apparaît clairement que ce n’est pas l’Iran qui est isolée et mise au ban des nations