Manlio Dinucci
12 octobre 2014
Une « résolution historique » : ainsi l'a définie le président des Etats-Unis Obama, en se donnant la parole en tant que président du Conseil de sécurité de l'Onu. La résolution 2178 sur les « combattants terroristes étrangers » adoptée par le Conseil de sécurité à l'unanimité, est « légalement contraignante » pour tous les Etats membres de l'Onu. Ceux-ci sont obligés de « prévenir le recrutement prévenir le recrutement, l'organisation, le transport et l'équipement d'individus qui se rendent dans d'autres Etats pour planifier, préparer ou effectuer des actes terroristes, ou pour fournir ou recevoir un entraînement terroriste et des financements pour ces activités ». A cet effet tous les Etats devront promulguer des législations appropriées, intensifier les contrôles aux frontières, poursuivre et condamner les terroristes (ou présumés tels), en accroissant la coopération internationale, y compris à travers des accords bilatéraux, et l'échange d'informations pour identifier les suspects terroristes.
La résolution exprime en général une « préoccupation quant à la constitution de réseaux terroristes internationaux », en laissant chaque Etat libre d'établir quels sont les groupes terroristes à combattre : d'où le vote favorable de Russie et Chine. Immédiatement après, cependant, la résolution souligne « l'exigence particulière et urgente de prévenir le soutien à des combattants terroristes étrangers associés à l'Etat Islamique de l'Irak et du Levant (Isis) ». Le ministre des Affaires étrangères russe Lavrov, sans toutefois nommer les Etats-Unis, a déclaré au Conseil de sécurité que les organisations terroristes se sont renforcées au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie centrale « après l'intervention en Irak, le bombardement de la Libye, l'appui extérieur aux extrémistes en Syrie », en accusant de fait Washington d'avoir favorisé la formation de groupes terroristes et de l'Isis même (comme nous l'avons amplement documenté dans ces colonnes). Le ministre des Affaires étrangères chinois Wang Yi a souligné que « les actions militaires doivent se conformer à la Charte des Nations Unies » et que « doivent être évités les double standard » (c'est-à-dire les deux poids et deux mesures). Mais en approuvant la résolution, Moscou et Pékin ont de fait permis à Washington de l'utiliser comme « motivation » légale pour l'action militaire lancée au Moyen-Orient qui, dirigée formellement contre l'Isis, vise la destruction complète de la Syrie, jusqu'ici empêchée par la médiation russe en échange du désarmement chimique de Damas, et la réoccupation de l'Irak. Ceci est confirmé par le fait que les attaques aériennes lancées en Syrie par les Etats-Unis, avec le concours de l'Arabie saoudite et des Emirats Arabes Unis, se concentrent sur les raffineries modulaires et autres sites pétrolifères syriens, sous le prétexte qu'ils sont exploités par l'Isis. Sur la base de cette même motivation, les Usa peuvent détruire tout le réseau d'industries et infrastructures syriennes pour faire s'effondrer le gouvernement de Damas.
Derrière l'apparente unanimité avec laquelle a été approuvée la résolution au Conseil de sécurité, se cache une confrontation de plus en plus aigue Ouest-Est amorcée par la stratégie étasunienne. Dans le discours prononcé à l'Assemblée générale de l'Onu, avant la réunion du Conseil de sécurité, le président Obama met « l'agression russe en Europe » sur le même plan que la « brutalité des terroristes en Syrie et Irak », soulignant que « les actions de la Russie en Ukraine défient l'ordre de l'après-guerre froide » en nous ramenant « aux jours où les grandes nations piétinaient les petites pour poursuivre leurs ambitions territoriales ». Pour cela « nous renforcerons nos alliés Otan et nous imposerons un coût à la Russie pour son agression ». Il rappelle ainsi, en s'adressant indirectement à la Chine, que « l'Amérique est et continuera à être une puissance du Pacifique », où elle promeut « la paix et la stabilité ». Où en réalité elle est en train de positionner des forces et des bases militaires pour « contenir » la Chine, qui est en train de se rapprocher de la Russie.
Une confrontation entre puissances nucléaires, accélérée par la course au réarmement lancée par le président Obama, qui reçoit maintenant le soutien d'un autre Prix Nobel de la paix, Lech Walesa. Comme sauvegarde contre la Russie, il a déclaré alors que l'Otan commençait une grande manœuvre en territoire polonais, « la Pologne doit se procurer des armes nucléaires ».
Traduit de l'italien par Marie-Ange Patrizio