10 octobre 2015
Cet entretien est extrait du « récit de voyage en Syrie » de M.A. Patrizio, dont nous publions la version intégrale sur le site à cette adresse http://csotan.org/textes/textes2.php?theme=PA
Hier soir deux combattants du Hezbollah sont arrivés au monastère de Mar Yakub, Qâra, où nous séjournons. Ils sécurisent la région avec l'Armée syrienne. Ils ont dans les 30-40 ans. Nous abordons d'autres jeunes aussi, nous voulons surtout leur témoigner notre amitié et admiration pour leur combat légaliste et pour leur pays. Un colonel d'infanterie nous consacre un entretien simple et cordial. Il dirige(ait) la zone sur laquelle se trouve le monastère.
Q : Conditions de travail de l'armée ?
R : Notre combat a été toujours contre Israël, au Golan. On n'avait pas l'habitude des combats de rue; les deux premières années ont été difficiles, mais à partir de 2013 notre expérience était acquise.
Q : Conditions de vie quotidienne acceptables ?
R : Il y a maintenant un peu d'organisation. Mais nous ne sommes pas des fonctionnaires de l'armée, nous sommes des engagés dans notre armée. C'est l'engagement qui compte pour nous, pas les conditions de travail. On défend notre pays, à n'importe quelles conditions.
Q : L'arrivée des Russes ?
R : A l'origine ce n'était pas notre souhait , mais c'est une guerre mondiale, ils doivent intervenir. Notre souhait est que la France change d'avis.
Q : Courage de l'armée syrienne
R : Quand les Russes ont vu les armes qui nous ont servies depuis 4 ans, ils étaient très surpris et nous demandaient comment nous avions fait pour combattre avec. Les armes sont importantes, bien sûr, mais c'est le combattant qui compte.
Quand, au début de la crise, l'émir du Qatar et Hariri ont dit : « dans un mois ou deux ont ira prier dans la mosquée des Omayyades », le journaliste égyptien Hussein Heikal leur a répondu publiquement : « si la moitié de Syriens est contre Bachar al Assad, oui, il tombera dans un mois ou deux. Mais si plus de la moitié de la population est avec lui, il tiendra ».
Il faut que vous sachiez bien qu'on n'idéalise pas Bachar al Assad : on est avec lui parce qu'il est pour le pays, mais s'il change on ne sera plus avec lui.
Bachar al Assad est très démocratique, il reconnaît quand l'avis de l'autre est plus intéressant, il utilise la même voiture que les autres. Quand il a visité le front il a même été à 50m des groupes armés, il a mangé avec eux, épluché ses pommes de terre, son œuf, etc.
On est pour le bien, la justice et la lumière. Chaque homme libre doit se sentir concerné par la Syrie. Un orientaliste a dit : « tout le monde doit sentir qu'il a deux pays : celui où il es né et la Syrie, berceau de la civilisation. Damas est habitée depuis 7000 ans, continuellement, sans coupure.
Q : il y a beaucoup de gens comme vous dans l'armée ?
R : Oui, beaucoup ! Ecris à tous ceux qui aiment la vérité, qu'ils viennent, c'est le pays de tout le monde ici » . « Bachar al Assad a un sens élevé de la morale, il a voulu faire de la politique par la morale, et ça ne marche pas ensemble. Lui, le Président, c'est une bonté ».
Commentaire de M-A. Patrizio:
Protégez vos vies, soldats de l'Armée arabe syrienne et combattants du Hezbollah, comme vous protégez celle du peuple syrien et les nôtres.
Avec cette entrevue nous aurons beaucoup appris sur la censure historiographique occidentale, sur l'histoire de la Résistance syrienne contre la colonisation, des « guerres des francs » (dites ici Croisades) à l'arrogant Gouraud en 1920, et à nos pitoyables « gouvernants » démocrates actuels. Et sur la noblesse et l'humanité des combattants.
Le colonel dirige(ait) la zone où est le monastère. Les soeurs et frères de la communauté nous ont dit la discrétion et le dévouement de cet homme; et son attention bienveillante à leur sécurité et à celle de ses soldats. De fait les jeunes appelés et réservistes que nous avons rencontrés autour du monastère étaient souriants, avenants, parlant sans crainte avec nous.