Manlio Dinucci
3 avril 2018
La Commission européenne a présenté le 28 mars le Plan d’action sur la mobilité militaire, “En facilitant la mobilité militaire à l’intérieur de l’Ue -explique la représentante des affaires étrangères de l’Union, Federica Mogherini- nous pouvons réagir plus efficacement quand surgissent les défis”. Même si elle ne le dit pas, évidente est la référence à l’”agression russe”.
Le Plan d’action a été réalisé non pas par l’Ue, mais par le Pentagone et par l’Otan. En 2015, le général Ben Hodges, commandant des force terrestres étasuniennes en Europe (U.S. Army Europe), a requis l’institution d’ “un Espace Schengen militaire” afin que les forces USA, pour faire face à “l’agression russe”, puissent se déplacer avec la plus grande rapidité d’un pays européen à l’autre, sans être ralenties par des règlements nationaux et des procédures douanières. Cette requête a été faite précisément par l’Otan : le Conseil Atlantique-Nord, réuni le 8 novembre 2017 au niveau de ministres de la Défense, a demandé officiellement à l’Union européenne d’”appliquer des législa-tions nationales qui facilitent le passage de forces militaires à travers les frontières” et, en même temps, d’ ”améliorer les infrastructures civiles de façon à les adapter aux exigences militaires”.
Le 15 février 2018, le Conseil Atlantique-Nord au niveau de ministres de la Défense a annoncé la constitution d’un nouveau Commandement logistique Otan pour “améliorer le mouvement en Eu-rope de troupes et équipements essentiels à la défense”.
À peine plus d’un mois après, l’Union européenne a présenté le Plan d’action sur la mobilité mili-taire, qui répond exactement aux requêtes établies par le Pentagone et par l’Otan. Il prévoit de “simplifier les formalités douanières pour les opérations militaires et le transport de marchandises dangereuses de type militaire”.
Ainsi se prépare “l’Espace Schengen militaire”, avec la différence que ce ne sont pas des personnes qui circulent librement mais des chars d’assaut. Mais déplacer des blindés et autres véhicules militaires sur route et sur voie ferrée n’est pas la même chose qu’y faire circuler des véhicules et trains normaux. On doit pour cela supprimer “les actuelles barrières à la mobilité militaire”, en modifiant “les infrastructures non adaptées au poids et aux dimensions des engins militaires, no-tamment ponts et voies ferrées présentant une insuffisante capacité de charge”. Par exemple, si un pont n’est pas en mesure de supporter le poids d’une colonne de blindés, il devra être renforcé ou reconstruit.
La Commission européenne “identifiera les parties du réseau trans-européen des transports adap-tées au transport militaire, en établissant les modifications nécessaires”. Celles-ci devront être ef-fectuées le long de dizaines de milliers de kilomètres du réseau routier et ferroviaire. Cela demande-ra une énorme dépense à charge des pays membres, avec une “possible contribution financière Ue pour ces opérations”. Ce sera de toutes façons toujours nous, citoyens européens, qui paierons ces “grandes oeuvres”, inutiles pour des usages civils, avec de conséquentes coupes dans les dépenses sociales et les investissements en oeuvres d’utilité publique.
En Italie, où se raréfient les fonds pour la reconstruction des zones sinistrées par les tremblements de terre, on devra dépenser des milliards d’euros pour reconstruire des infrastructures adaptées à la mobilité militaire. Les 27 pays de l’Ue, dont 21 appartiennent à l’Otan, sont maintenant appelés à examiner le Plan. L’Italie aurait donc la possibilité de le rejeter. Ce qui cependant signifierait, pour le prochain gouvernement, s’opposer non seulement à l’Ue mais à l’Otan sous commandement USA, en commençant à se détacher de la stratégie qui, avec l’invention de la menace russe, prépare la guerre, véritable celle-là, contre la Russie.
Ce serait une décision politique fondamentale pour notre pays mais, étant donnée la sujétion aux USA, elle reste dans le domaine de la politique-fiction.
Traduit de l’italien par M-A Patrizio