Heureusement, l'Otan nous protège...


1 mai 2020

Alors que la pandémie éclatait en Europe, le Secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, s'inquiétait : “J’attends des Alliés qu’ils restent engagés dans leurs investissements pour leur défense”, déclarait-il à la mi-mars. Il avait bien raison de s’alarmer : les populations des pays de l'Otan risqueraient d’avoir l’idée saugrenue de reconsidérer  leur  problème de "sécurité & défense" et ne finissent par se demander si leur réelle sécurité, leur réelle défense, ne serait pas plus assurée par des investissements dans le secteur public, les soins de santé, les matériels médicaux, les hôpitaux, plutôt que par des bombes nucléaires et des bombardiers.

En février 2019, lorsque le gouvernement belge faisait détruire son stock stratégique de masques FFP2 et décidait, pour "faire des économies”, de ne pas le renouveler, il avait déjà avalisé l’achat de 34 chasseurs bombardiers F-35 pour 4 milliards d’euros - et pour un coût estimé actuellement à 15 milliards au final, service après-vente compris. On voit où sont les priorités du gouvernement.
 
L’Otan a également le sens des priorités. Malgré la catastrophe humaine inédite que constitue l’épidémie, avec l’Europe comme épicentre, l’Alliance n’a nullement annulé l’opération Defender 2020, qui mobilise des milliers de troupes à travers l’Europe confinée. Les contraintes liées à la pandémie ont tout juste forcé l’Otan à restreindre ce qui devait être le plus grand exercice de l'armée US en Europe en 25 ans, simulant une agression nucléaire contre l’ “ennemi” russe. 

Alors que l’épidémie commençait à déferler sur un Iran fragilisé par les sanctions occidentales, les Etats-Unis décrétaient de nouvelles sanctions contre le pays ; fin mars les USA mettaient la tête du président élu vénézuélien à prix et envoyaient une flotte militaire contre ce pays, rejointe quelques jours plus tard par des navires de guerre français et britanniques. La « lutte de l’Otan contre le trafic de drogue » dissimule à peine la volonté de durcir le blocus maritime au moment même où le Venezuela pourrait, espèrent-ils, être mis à genou par la pandémie.

Le Secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, avait pourtant appelé à « la levée des sanctions qui peuvent saper la capacité des pays à répondre à la pandémie ». Les Alliés eux semblent y voir plutôt une belle opportunité de “changement de régime”.

A un moment où toutes les ressources auraient dû être entièrement mobilisées au service de l’humanité, les pays de l’Otan offrent le spectacle d’une inhumanité impitoyable. L’Otan défend nos valeurs, répètent-ils. Sont-ce vraiment là les valeurs que nous voulons défendre ? Qui et de quoi l’Otan protège-t-elle réellement ? Il y a quelques mois encore, Stoltenberg, comme tant d’autres de nos dirigeants, aimait répéter que “l’Otan est le socle de la sécurité européenne et transatlantique”. Jamais un tel discours n’a sonné aussi creux aux oreilles des populations confinées.