L’OTAN a célébré officiellement son 75e anniversaire lors duSommet qui s’est tenu à Washington du 9 au 11 juillet. Nous analysons dans les pages qui suivent l’inquiétante déclaration belliciste publiée à l’issue de ce Sommet
Le « contre-sommet » s’est tenu cette année-ci quelques jours avant le Sommet, les 6 et 7 juillet. Occasion pour les représentants des mouvements pour la paix de tous les pays de se rencontrer et d’échanger dans la perspective d’un mouvement global contre l’OTAN et ses guerres.
La Belgique, qui a le triste honneur d’abriter les QG de l’OTAN, était présente en force. Le CS0 était représenté par Bud Blumenthal, qui a délivré au contre-sommet le message suivant.
Le Comité de Surveillance OTAN salue avec une grande émotion les militants venus de tous les coins du monde pour ce Contre-sommet et en particulier les associations des Etats-Unis qui se mobilisent sans répit pour faire entendre la voix de l’intelligence et de la raison des peuples qui veulent en finir avec les guerres.
Dans mon pays d'adoption, la Belgique, le Mouvement de la Paix est particulièrement concerné, car le siège de l'OTAN se trouve à Bruxelles, avec le quartier général militaire dans le sud de ce petit pays (Mons). Il y a des armes nucléaires américaines déployées dans le nord-est, tandis quele port d'Anvers est un point d'entrée essentiel pour les troupes américaines et l'équipement militaire, comme on l'a vu pendant la guerre du Golfe. Bruxelles est aussi le siège de l’Union européenne très proche de l’OTAN dans son orientation géopolitique.
En d'autres termes, en cas de guerre, mon pays d'adoption serait l'une des premières cibles militaires légitimes. On dit et on répète que l'OTAN nous protège, mais en fait, l'OTAN nous met en danger.
En Belgique, comme dans toute l'Europe, et peut-être ici aussi, le Mouvement de la Paix est plongé dans une grande confusion depuis l'entrée en guerre ouverte de la Russie en Ukraine le 24 février 2022. Mais ce n'est pas nouveau.
Mon organisation, le Comité de surveillance OTAN, est née en 1999, au lendemain de l'agression de l'ex-Yougoslavie par l'OTAN, la dite guerre du Kosovo. A l'époque, le Mouvement de la Paix s'était également divisé entre ceux qui se laissaient prendre par la propagande de guerre de l'OTAN sur les « atrocités serbes » et le prétendu génocide en cours, ceux qui renvoyaient l'OTAN et les Serbes dos à dos, "ni l'OTAN ni Milosevic" disaient-ils, - et ceux qui dénonçaient la propagande de guerre et plaçaient l'agression de l'OTAN dans le cadre géopolitique mondial de l'assaut de l'impérialisme contre le reste du monde, pour la perpétuation de l'hégémonie de l'Occident. Le Kosovo est d'ailleurs à la racine du conflit ukrainien.
La situation était très similaire en 2011, lorsque l'OTAN a détruit la Libye sous de faux prétextes. À l'époque, beaucoup de nos camarades ont été affolés par la propagande de guerre, beaucoup d'autres ont crié "Ni OTAN, ni Kadhafi"... maintenant, il n'y a plus de Milosevic, plus de Kadhafi. Mais l'OTAN lui est toujours bien là.
Aujourd'hui, le mouvement pacifiste est profondément divisé entre ceux qui pensent qu'il faut condamner la Russie avant toute chose, certains applaudissant l'aide militaire de l'OTAN à l'armée de Zelensky, d'autres renvoyant dos à dos l'impérialisme occidental et le prétendu impérialisme russe, "Ni OTAN, ni Poutine" - et ceux, et c'est la position de mon organisation, pour qui il est essentiel d'identifier la cause première de cette guerre, de la replacer dans le cadre général des guerres de l'OTAN, de réaliser quels sont les enjeux exacts de ce conflit ukrainien. De cette guerre entre l'OTAN et la Russie, utilisant l’Ukraine comme champ de bataille.
La guerre en Ukraine n'a pas commencé le 24 février 2022. Elle a même commencé avant le coup d'État de 2014 et les huit années, passées sous silence, de répression et de bombardement de la partie orientale du pays par les héritiers de Bandera. A la fin de la Guerre froide et la dissolution du Pacte de Varsovie, l'OTAN, au lieu de disparaître en même temps que sa "raison d'être" officielle, n'a cessé de se renforcer et s'étendre jusqu'aux portes de la Russie.
La guerre actuelle est le désastreux aboutissement de décennies d'une politique de confrontation, de volonté de domination, de négation du principe de sécurité mutuelle.
Et cette guerre n'est qu'une partie d'une guerre beaucoup plus vaste. Derrière la défaite espérée de la Russie, se profile la guerre attendue avec la Chine. Comme Boris Johnson l'a reconnu sans ambages il y a quelques semaines, "If Ukraine falls, it will be a catastrophe for the West. It'll be end of Western hegemony".
Voici les réels enjeux. Cette guerre en est la version plus large de celle menée par Israël, partenaire privilégié de l’OTAN au Moyen Orient. Et au-delà, elle est le prélude d’une guerre encore plus vaste contre la Chine. Ensemble, elles font partie de la même fuite en avant pour préserver à tout prix l’hégémonie occidentale.
Nous n'avons pas besoin de cela, nous n'avons pas besoin que toutes les ressources soient aspirées par la politique de guerre, et soient détournées des urgences fondamentales de l'humanité, la lutte pour le climat, la lutte pour l'éradication des armes nucléaires
Nous avons besoin de toute urgence d'un mouvement pacifiste mondial puissant qui s'oppose en pleine conscience à la guerre mondiale que l'OTAN prépare activement, avec la pleine complicité des dirigeants européens, qui suivent la feuille de route de l'OTAN.