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Syrie, 3-17 octobre 2015
Récit de voyage par M-A. Patrizio

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1. Matins de Roses

Marie-Ange Patrizio
29 octobre 2015

Syrie, 3-17 octobre 2015
Derrière l’image médiatique, le courage et la détermination des Syriens

Je reviens d’un séjour de deux semaines en Syrie, à mon initiative après avoir été contactée en octobre 2014 par Mère Agnes-Mariam de la Croix : elle me demandait de constituer un petit groupe pour, comme en novembre 2011, venir voir la situation sur place et en témoigner ici à notre retour. Peu de gens ont été intéressés par cette invitation, et Mère Agnès, ensuite, a été occupée par d’autres priorités.

 L’idée a fait son chemin grâce à quelques contacts d’amis sûrs en Syrie, qui m’ont permis d’envisager et organiser ce voyage avec le plus de sérénité possible. Et ce malgré l’intoxication ambiante ici, pour vous décourager d’aller voir par vous-mêmes ce qui se passe sur le terrain.

  Une année a été nécessaire pour mettre ce projet à exécution. Finalement il s’est trouvé que notre séjour en Syrie a eu lieu à un moment qu’on peut qualifier d’exceptionnel : quelques jours après le début de l’offensive de l’aviation militaire de la Fédération de Russie, en soutien et à la demande du Président al-Assad. On ne pouvait mieux tomber, dans le climat de soulagement et d’espoir renaissant du peuple syrien et de son armée. Et de sécurité accrue dans une grande partie du territoire que l’Armée syrienne et les combattants du Hezbollah libèrent de jour en jour des mercenaires takfiristes et autres rebelles très peu modérés que nos gouvernants ont soutenus[1].

  Je ne voulais pas partir seule. J’ai fait ce voyage avec deux amies : D., qui, ayant été plusieurs fois en Serbie avant, pendant et après la guerre de l’Otan, voulait, pour diverses raisons, aller en Syrie. Et R., une consoeur psychologue et psychanalyste syrienne et française, parlant arabe donc, et connaissant bien son pays dans lequel elle retourne régulièrement et fréquemment pour voir sa famille et ses amis ; y compris depuis le début de la « crise » (mot généralement utilisé pour qualifier la situation de ces dernières années). Nous avions en elle une interprète attentive à la précision des mots et des gestes. Grâce à elle, ce voyage a commencé par un séjour chez l’habitant, en montagne, dans la province de Hama : accueillies dans des foyers chaleureux qui nous ont introduites dans la vie quotidienne de ce pays.

  Ce récit n’est pas un reportage d’«envoyé spécial» mais celui du séjour d’une voyageuse, psychologue retraitée, mettant à profit son expérience professionnelle et prenant le temps pour regarder et écouter. Et répondre. Sans comptes à rendre à un patron de presse ou à un secrétaire de parti.

  Et revenant, enfin, visiter notamment ceux qu’elle a connus il y a quatre ans. Quatre longues et dures années pour les Syriens qui sont restés dans leur pays, en résistant.

Pour une Marseillaise sans voiture, un voyage en Syrie commence à l’arrêt du bus n° 12,  direction « Éoures» ; descendre à l’arrêt « Camoins les bains » et chercher la Villa Les Cèdres dans le Domaine des Sources. Quelques centaines de mètres, et vous toquez à la porte du Consulat de la République arabe de Syrie (ouvert le matin) : on vous donnera le formulaire à remplir en double exemplaire (faire soi-même la photocopie, on peut faire ça pour la Syrie) et la liste des pièces à fournir : deux photos, 60 euros en espèces (ça a augmenté depuis novembre 2011-20 euros- mais ça se comprend), justificatif de revenus. Vous déposerez ces documents avec votre passeport et reviendrez le chercher avec son visa environ 8 jours plus tard.

   C’est tout. En ce moment, comme il n’y a pas de file d’attente à la porte du Consulat, il m’a fallu moins de 10 secondes pour retirer le visa. Donc : ne pas se laisser impressionner par l’intoxication menaçante du site du Ministère des Affaires Etrangères et les rumeurs conformes de nos médias.

   A cause de l’embargo occidental depuis quatre ans environ contre la République arabe syrienne, vous ne pourrez pas prendre -pour le moment- depuis la France (et pays de l’Ue) un avion direct pour Damas ou une autre ville syrienne. Nous avons choisi de passer par Beyrouth. A-R : 465 euros (via Paris CDG) en s’y prenant quelques semaines à l’avance. Visa gratuit au Liban si on n’y séjourne pas.

   Un taxi que connaît R. nous attend à l’aéroport, nous partons en toute confiance. Cet élément est essentiel pour un voyage en Syrie en ce moment : sécuriser tous ses déplacements d’un point à un autre du territoire.

  On peut évidement prendre un taxi collectif ou un bus, mais avec le risque d’être ralenti aux barrages (dits check points par les reporters de guerre français) et postes frontières. Consigne, pour nous : se faire discrètes et s’en remettre au chauffeur du taxi et à R. en cas d’éventuelles questions et négociations.

 On quitte l’aéroport vers 20h dans les embouteillages du samedi soir à Beyrouth, pour aller prendre la route de Tripoli et entrer en Syrie par la frontière nord du Liban. Joli trajet nocturne, souvent en bord de mer, et arrivée assez rapide à la frontière quasiment déserte ; mais on va y rester un long moment. On finit par descendre de voiture, et on bavarde avec deux femmes qui attendent leur famille venant de l’autre côté, dont une très jeune avec un nouveau-né : échanges autour du bébé -je viens d’avoir un premier petit-fils- et donc on parle nuits blanches (ou pas), fréquence des tétées, etc. Bref, on papote pendant que les douaniers ou la police (je ne me souviens plus) scrutent nos passeports : comme ce poste frontière n’est pas celui par où passent généralement les touristes, ces fonctionnaires-là ne savent pas bien écrire français, et il leur faut le temps de recopier, vérifier etc. Beaucoup de temps. Notre chauffeur et R. expliquent la situation, qui, au demeurant, n’en a pas besoin ; et on entre en Syrie.

 On va passer un certain nombre de barrages, que j’ai oublié de compter. A certains postes, proches de la frontière, on voit partir quelques petits rouleaux de billets (de 100 Livres Syriennes) ; corruption ? Oui. J’ai regardé les billets, ça doit faire l’équivalent de quelques euros, pour tout le monde (de nous trois dont deux Françaises pour, parfois, trois ou quatre « gardiens »). Certains qualifieraient ça de symbolique ; un symbolique qui pourrait leur coûter cher, et qui est presque grotesque pour nous, car le montant de la somme ne vaut pas le risque de se faire passer pour des mafieux… Mafia ou misère des salaires actuels ? Tout le monde, heureusement, ne pratique pas cette auto-augmentation, au détriment des voyageurs. Rien de bien gras, surtout pour des étrangers (habitués à d’autres niveaux de corruption) ; mais ça n’est pas une raison pour le passer sous silence.

   Et on poursuit notre route dans la nuit de collines qui deviennent petites montagnes, avec de moins en moins de monde sur les routes et dans les villages traversés. Ambiance moyennement rassurante pour nous qui débarquons avec, en tête, l’intoxication de nos médias et l’inquiétude de nos proches. Le chauffeur conduit très rapidement en écoutant de la musique, freinant au dernier moment à chaque ralentisseur (ou brise-vitesse) qu’il semble bien connaître quoique très nombreux. Ralentisseurs et barrages rallongent beaucoup le temps du trajet mais nous apprécions quand même d’être arrêtés pour être contrôlés : garantie  -en partie- de notre sécurité sur la route. Mais les contrôles ne sont pas toujours rigoureux.

  On arrive vers minuit au village où nous sommes attendues ; on paie notre taxi -environ l’équivalent de 120 euros si je me souviens bien, à trois, pour un peu moins de 150 Kms de nuit, tout compris. Nos hôtes ont préparé un excellent repas : sorte de ragoût de poulet sur des pommes de terre fondantes et parfumées à toutes sortes d’herbes (et gingembre).


Lever de soleil au village, 4 octobre 2015, province de Hama.

  Dimanche matin, réveil par les cloches dans ce village majoritairement chrétien ; Willy, le plus jeune fils de nos hôtes, regarde Tom et Jerry à la télé : « Hannah (de « Hannah & Barbera ») était d’origine syrienne », me dit B., son père.

  Et puis on va voir les petits chiens (de chasse) dehors, à côté du grenadier, des figuiers et des cognassiers où les fruits sont superbes. B. revient de la chasse avec un filet plein de 18 cailles. Il chasse dans la montagne un peu plus loin ; seul avec son chien… Dans cette zone, chacun sait où est le danger, et que ce danger est circonscrit à certains villages. Et que ces villages sont ceux où une majorité de la population a depuis le début de la crise accueilli les groupes armés. Sans quoi, ces « rebelles », dans ces zones là, n’auraient pas pu pénétrer, s’installer et commettre leurs exactions sur ceux qui approchaient. Depuis des mois, il n’y a apparemment plus de snipers en dehors de ces villages : ils ne s’éloignent pas trop de leur trou. Donc on peut -raisonnablement- aller à la chasse et ramener des cailles (qui migraient, les pauvres) pour nourrir une tablée du dimanche. On les met au congélateur et on les plume un peu plus tard pour le repas vers 14h-15h : grillées, délicieuses.

  Et on prend le temps de faire connaissance, comme ça vient, R. traduisant tous azimuts.

Deuxième élément essentiel : si vous n’avez pas d’ami syrien proche, qui traduise ces bribes de conversations, éléments familiers et parfois intimes, c’est dommage. Car tous ces petits échanges quotidiens s’avèrent des sources d’informations et de compréhension de la situation politique syrienne aussi précieuses que les interviews plus officielles que nous ferons avec des personnages au demeurant passionnants. Des prix des ingrédients pour préparer le repas (ceux qui sont fixes, et fixés par le gouvernement), aux difficultés ou pas d’approvisionnement, marché noir, rationnements ou pas d’électricité, gaz et eau, de l’école, des devoirs et des programmes, du fonctionnement de la vie administrative, commerciale, sécuritaire etc. ; dans la cuisine avec les femmes de la maison, et ceux qui viennent voir de temps en temps où ça en est.

   Universalité des difficultés de temps de guerre, de la solidarité entre voisins et/ou de l’exploitation par les crapules. La lâcheté et le courage que révèle l’adversité.

  Donc avant de partir en Syrie, prenez le temps de vous faire un ou une amie Syrienne. Sinon, comme nos journalistes : qui payent un interprète, généralement proche de notre régime à nous, et se vantent de l’indépendance et neutralité de leurs médias.

  Résumé : la vie est bien plus chère (multipliée par quatre, par dix selon les denrées) depuis le début de la crise à cause notamment des destructions, de l’embargo, du trafic et de la contrebande ; dans les campagnes les gens ont peut-être moins souffert que dans les villes, comme toujours. Grâce aux jardins, aux animaux qu’on élève, à la solidarité familiale et villageoise, obligée ou spontanée. Comme une partie de la Syrie, ces villages sont restés plutôt à l’écart des agressions terroristes. Dans cette atmosphère familiale et campagnarde, on est loin, nous aussi, de la guerre qu’on décrit chez nous. On ne s’en plaindra pas.

  Le soir on veille sur les terrasses, assis ou allongés sur des tapis ; j’en ai vu un de l’UNHCR, sorte de rabane bleue avec tous les insignes, inscriptions et logos des généreux donateurs (avec nos sous) ; les réfugiés-déplacés qui les reçoivent les échangent contre ce dont ils ont -vraiment- besoin. Et on boit le maté, avec les herbes locales. La douceur de l’air et de l’ambiance est surprenante pour nous qui arrivons de France. L’atmosphère est parfois très légère. Mais personne dans les maisons où nous étions accueillies n’a perdu de parent.

  Nous savourons le bonheur d’être là, et c’est étonnant pour nous. Pour nos hôtes aussi, peut-être, qui ne peuvent pas imaginer l’ampleur de l’intoxication dans laquelle on baigne chez nous. Même si tous suivent en continu les nouvelles à la télé (pas seulement syrienne, mais pas encore d’Internet ici : c’était prévu en 2011) ; comme la majorité des Syriens –en zone débarrassée des « rebelles »- ils sont très informés. Personne n’a d’illusion sur la nature de notre régime impérialiste et ils connaissent mieux que nous l’implication de nos gouvernements occidentaux dans l’agression dont ils sont l’objet depuis quatre ans et demi ; mais, comme tous les gens que nous avons rencontrés dans notre séjour, ils ont l’intelligence et l’aménité de faire la différence entre les gouvernements de vendus qui les agressent et les populations. Et nous sommes venues avec une de leurs proches – parente ou voisine ou amie d’enfance. Alors nous bénéficions d’un a priori de bienveillance et de confiance.

  Au travers des nombreuses coupures d’électricité : de tout notre séjour en Syrie, c’est ici qu’elles auront été le plus fréquentes, imprévues et longues. Les habitants, depuis plus de quatre ans de guerre, se sont procurés groupe électrogène et LED qui prennent le relais en fournissant une petite lumière. Pas de coupure d’eau pendant notre séjour, ou en tous cas nous n’en avons pas souffert.

  Lundi matin 5 octobre, un peu de tourisme : nous allons à Masyāf, acheter les meilleurs falafels de Syrie, nous dit-on. Un délice en effet pour l’équivalent de quelques dizaines de centimes d’euros.


Rue commerçante à Masyāf, 5 octobre 2015


La boutique du falafel, Masyāf, 5 octobre 2015

Sur la route, toujours des ralentisseurs et des barrages, fréquents ; tant mieux. E., qui nous conduit, connaît souvent les soldats postés dans la région, qui changent tous les 15 jours, je crois… Les échanges ne sont jamais anodins. Avec ceux qu’il ne connaît pas, les salutations sont respectueuses et évoquent le patriotisme, de façon parfois poétique. Mais pleine d’humour avec ses copains : « matin de roses » en guise de bonjour… Je regrette de ne pas les avoir tous notés ; dans tous les cas une expression sincère de la reconnaissance envers ces soldats qui les protègent et risquent leur vie en cas de revers subit. La plupart des contrôles sont réels.

  Tout le long du trajet, dans les villages sont exposés les portraits des « martyrs » : soldats qui ont été tués au combat ou dans des guet-apens, aux barrages. Abattus par des tirs, dans le meilleur des cas. Sinon, l’horreur habituelle des sadiques qui font « du bon boulot » comme dit l’autre. Ces portraits jalonnent la présence bouleversante des jeunes disparus, souriants, en treillis, les moins jeunes photographiés avec leurs enfants. Vous pensez, toujours, aux jeunes hommes du même âge de votre entourage. L’horreur de cette guerre et le courage des combattants de l’Armée syrienne sont incarnés dans ces portraits. Le peuple syrien ne les oublie pas.

  Sur le pare-brise arrière d’une voiture, devant nous, on déchiffre une inscription écrite à la main sur une bande de papier : « Ils ont oublié qui est ton père, ils t’ont fait la guerre, Monsieur le Président ».

 Après-midi dans le village, des jeunes adolescents essaient quelques mots de français : « comment tu t’appelles ? ». Basique. Mais quand je lui dis : « et toi ? », la panne. Le français se fait rare. En fin d’après-midi, on va promener dans les oliveraies, pas trop loin quand même ; et on rentre dans l’obscurité, surprises par la nuit qui tombe vite et plus tôt que sous nos latitudes. Mais ici comme à Damas chacun sort avec sa lampe de poche ou s’éclaire avec son portable. Le système de petits canaux pour irriguer les jardins potagers en fond de vallons est le même qu’en Haute Provence ; chacun a son tour de distribution. Peut-être avec les mêmes histoires de détournement qu’ici.

Mardi 6 octobre : férié, anniversaire de l’offensive du 6 octobre 1973 contre Israël, dite « guerre de Kippour » en Occident. On va profiter du jour férié pour partir à Hama, via un village de la plaine où nous attend un ami d’E. ; on verra aussi ses enfants puisqu’ils n’ont pas école ce jour-là.

Sinon, horaires de l’école : 8h-13h, en tablier bleu roi, uniforme obligatoire : dictatorial ou démocratique ? A certains endroits les enseignants ont dû organiser deux horaires (matin et après-midi) pour que tous les enfants puissent aller en classe, après les destructions de locaux scolaires par les « révolutionnaires » et autres « rebelles modérés ».

   Excursion à Hama : on apprendra ensuite que ça a bardé ces jours-là dans des villages proches, mais pas du côté où on est arrivé. Nous allons voir un atelier de tissage traditionnel réputé, avec l’intention de faire quelques emplettes. On s’arrête en chemin chez B. qui va nous emmener dans sa voiture car il connaît bien les routes et les rues de la ville (et leurs ralentisseurs) et les barrages.

  On est reçu par toute la famille pour une pause thé-café-maté, dans un salon aménagé au sous-sol après quelques menaces et bombardements des méchants.

  L’aînée est une jeune collégienne en 3ème, qui apprend le français depuis la 5ème, l’anglais depuis la maternelle. Nous l’appellerons Adèle, c’est une excellente élève disent ses parents. Réservée mais curieuse et intéressée par nos questions auxquelles elle répond sans être interrompue par les adultes ; coquette, bandeau et noeud dans les cheveux (longs, je n’ai pas vu de femme avec des cheveux très courts en Syrie : c’est peut-être à ça qu’on distingue une étrangère dans la rue). Elle voudrait être médecin. Le niveau scolaire est équivalent à la France.

  Dans ce village qui est chrétien, « garçons et filles sont ensemble en classe. A Damas chez les musulmans (sunnites), ils sont séparés. Chez les Alaouites, mélangés ». E. : « c’est aussi à cause de ça qu’on arrive là où on en est ».

 Ecole publique, gratuite ? Toute la famille acquiesce. Mais il y a des écoles privées (des universités privées aussi). « Tu paies l’inscription : très peu. Selon tes notes tu peux avoir ce que tu veux, choisir ta filière ». Ici, comme au village où nous sommes, il n’y a pas eu d’interruption de la scolarité depuis le début de la crise.

   Marie, qui nous reçoit : « les prix ont beaucoup augmenté, multipliés jusque par 10. Prix tarifés : pain, mazout, etc.  Mais il y a des pénuries à cause du marché noir. Le pain est plus cher depuis la  crise mais fixé par l’Etat. Avant les 12 galettes coûtaient 40 LS (au taux de change actuel, variable d’une heure à l’autre ces jours-ci, environ dix centimes d’euro), maintenant fixe à 100 LS ». Adèle fait le service.

Certains commerçants trafiquent par rapport à l’Etat qui fournit les denrées ; ils stockent  les galettes pour les vendre plus cher ensuite, quand ils ont créé la pénurie. Classique.

m-a : les enfants par rapport à la guerre ?

Ils ont « une conscience de la guerre et quand ils entendent les adultes discuter, parler de Daesh, ils ont peur. Ils entendaient quand ça a bombardé, il y a eu trois jours de frappes intensives, ici ; ils ont eu peur, sont descendus au sous-sol se cacher. Il y a la peur quand même. Quand on voyage, quand ils vont à l’école, peur des kidnappings, des explosions. Il y a eu des kidnappings. On a entendu que des enfants ont été enlevés, ne sont pas revenus, sur la route, dans les champs, pendant le travail de la terre [on a vu aussi des enfants gardant des moutons, à côté de la route]. Ici, il n’y a pas eu d’enlèvements d’enfants, seulement des adultes et seulement des hommes, pas des femmes.

Par contre certains sont partis de Syrie ».

m-a : beaucoup sont partis à l’étranger ?` « Toutes les semaines, une vingtaine par semaine, peut-être 2500 depuis le début ». Surtout des chrétiens qui partent. Ça s’est accéléré ces derniers mois. « Ici ils ont commencé à partir dès la 2ème année de guerre (2012) ; maintenant les femmes seules partent, des jeunes filles aussi. Ils vont surtout en Allemagne, et en Hollande. En Allemagne ceux qui ont de la famille qui fait les papiers pour les faire venir ».

m-a : comment ils partent ? « Par des routes parallèles, pas officiellement. Ils vont d’abord au Liban officiellement, ou en Turquie et après, de là, ils partent en Allemagne. C’est très dangereux. Au village aucun n’est mort pendant le voyage.

Les passeurs les ont mis [dans une barque] au milieu de la mer, les garde-côtes les ont ramenés. On entend beaucoup d’histoires différentes, mais on ne sait pas la vérité. Il y a eu des histoires plus graves -enfants égorgés- qui n’ont pas été médiatisées, dont on n’a pas parlé ».

Dans le village il y a 20.000 habitants, et 4 églises.

m-a : et l’eau ? « Il y a eu 3 jours de coupures. Quelqu’un au village, qui a un très grand réservoir, l’a stockée et revendue ensuite, réserve quotidienne pour une famille, au prix public d’un mois ».

L’Etat est au service de la population.

m-a : Impôts ? Quasiment pas d’impôts. Les commerces ont un impôt symbolique, pas sur le bénéfice, un forfait. Lui travaille dans le bâtiment, il construit et vend. Il paye la patente. Il est contrôlé chaque année, pour voir si son activité a augmenté. Et s’il vend « par exemple pour 30 millions de LS il aura un impôt d’environ 800.000 LS ».

  L’accueil de toute cette famille est chaleureux, attentif et généreux. Au milieu de deux statues du Sacré-Coeur de Jésus, dans le salon : mon père disait qu’une maison était protégée quand on y exposait l’image du Sacré-Coeur. De fait, même avec une toute petite image dans l’entrée, nous n’avons jamais été cambriolés et la maison était souvent ouverte ; alors…

  Depuis la route pour Hama, on voit d’abord des oliveraies, puis dans la plaine des champs de maraîchage : choux, pommes de terre, d’autres légumes et du tabac. Deux cimenteries (non endommagées), dont une très grosse, iranienne, installée depuis longtemps ; l’autre est à l’arrêt, à cause de la pollution qui aurait causé des cancers dans la région. On croise souvent des militaires, à deux sur la mobylette, fusils en bandoulière, sans casques -personne n’en porte, ici- l’air décontracté, peut-être en permission ce 6 octobre. Aux barrages, sécurité garantie : « sur ma tête et sur mes yeux », disent les soldats.

  Hama, fief des Frères Musulmans jusqu’en 82 et lieu du fameux « massacre de la population civile » par « le régime »[2].

  De nombreuses femmes que nous croisons sont voilées (le plus légèrement, à la sunnite, c’est élégant). Les rues du jour férié sont animées et l’atelier de tissage où nous allons est dans la vieille ville, pas très loin des norias. Nous y trouvons deux des quatre frères tisserands. Ils nous montrent comment ils travaillent sur les métiers manuels traditionnels : c’est costaud…


 Métier à tisser manuel, Hama, 6 octobre 2015

 Exclusivement coton et soie produits en Syrie : élégance traditionnelle des couleurs naturelles et des matières, dessins sobres. Les métiers en action produisent une infime poussière de coton qui tamise une lumière douce dans l’atelier, dans le claquement cadencé des machines.


Les quenouilles, 6 octobre 2015

Le magasin où sont entassés les tissus (exclusivement accessoires pour la maison) est pour nous la caverne d’Ali Baba ! Difficile de choisir dans toutes ces pièces artisanales à des prix inférieurs à celles produites industriellement par les grandes marques européennes.


Dans la cour des artisans, Hama, 6 octobre 2015

  Nous bavardons avec les artisans sur les techniques, les matériaux et les outils, l’ancienneté de cet artisanat dans leur famille (1853), l’architecture de la maison (450 ans, plusieurs fois brûlée et reconstruite au cours des siècles), les difficultés d’approvisionnement mais surtout, maintenant, de vente ; export rarissime, alors que leur marque était réputée internationalement. L’atelier a été incendié au début de la crise ; le plus grand métier à tisser a été brûlé, il en reste deux. Sur les huit frères qui travaillaient ensemble, quatre ont émigré et quatre sont restés à l’atelier. Quoi qu’ils fassent et pensent, sur quoi nous n’avons pas posé de question, ils sont là et font vivre les techniques du savoir-faire artisanal syrien.

   Dans la petite cour où on nous offre le café, il y a cinq cages avec des canaris qui animent la maison quand les métiers sont à l’arrêt. Le jeune fils d’un des artisans me montre une boîte en plastique où il a deux poissons. Il voudrait être médecin.

  Retour vers la voiture et les grandes norias sur l’Oronte, à l’arrêt car il n’y a quasiment pas d’eau dans le fleuve. Des jeunes garçons qui chahutent dans l’eau croupie, en contre bas, se font prendre à partie par des passants (hommes) sans que ça ne les trouble le moins du monde. Nous faisons quelques photos, et voyons passer, indolent, un chameau d’apparat : vestige des périodes où il y avait du tourisme ?


Grande noria sur l’Oronte, Hama, 6 octobre 2015

   Enfin nous allons chez le fameux glacier, autre objectif de notre excursion : glace au lait, gâteaux au fromage blanc, et petits gâteaux traditionnels : tout exquis et très peu cher, pour nous bien sûr. Les ouvriers pâtissiers, un peu étonnés de voir des étrangers, sont affables, acceptant volontiers qu’on photographie leurs gestes efficients et spectaculaires.


Les pâtissiers à Hama, 6 octobre 2015

 Il n’est pas encore midi, il y a peu de monde dans le salon de thé. Deux jeunes femmes sont attablées, voile sunnite mais sans hommes. Dans la rue, on nous a prises pour des Russes : personne d’autre ne viendrait en ce moment ? A propos, Hama est le premier endroit où nous avons vu des maisons démolies, en bordure de la vieille ville. Ça ne semblait pas du tout récent.

   Sur le chemin du retour nous allons voir Hector ; il fait son service militaire à Damas depuis le début de la crise. Appelé il y a 5 ans et demi, pour 18 mois en principe. Prolongé par la crise. Depuis mars 2011 c’est sa première permission de 5 jours. Grâce à l’intervention russe qui desserre l’étau terroriste donc la pression sur l’Armée arabe syrienne. Interprète :

« S’il parle à un niveau personnel il trouve que ça fait longtemps, pour son avenir, pour sa vie, ça l’a empêché de poursuivre ses études. Il a fait quatre ans de plus que le service normal. Il ne sait pas combien de temps il va rester encore (il peut s’engager jusqu’à 42 ans). Mais c’est une guerre et tout le monde doit défendre le pays. Il est content d’offrir ça pour son pays mais il demande qu’on lui donne ses droits, il pourrait même s’engager si on lui donnait ses droits ».

 Ses droits ? « Les conditions de vie sont dures, permissions non adaptées à leur poste par rapport à leur domicile ; et il y a des différences entre les régiments, certains sont mieux organisés. Lui a un grade de sous-officier, moyen (Les grades sont ceux du système français).

   Beaucoup d’officiers traitent leurs hommes de façon plus tendre maintenant, sont plus sympas. Certains officiers demandent qu’on respecte les règles à la lettre mais comment être conforme aux règles militaires alors qu’on ne leur donne pas ce qu’il faut ? Les uniformes, par exemple : il a acheté le sien, parce que celui qu’il avait était complètement usé. Le fait est qu’on a vu beaucoup de jeunes soldats jamais dépenaillés mais avec une allure (barbe et cheveux) plus guérilléro que navy seal.

  Pour certains officiers, si par exemple un appelé a un retard de 4h au retour d’une permission de 4 ou 5 jours, il va au trou. Mais heureusement ces officiers là sont rares. Lui est artilleur dans l’armée. Ils n’ont pas eu de bonnes munitions, pas eu une véritable organisation au début de la crise, affectés à des tâches pour lesquelles ils n’avaient pas d’entraînement ; et des soldats sont morts à cause de ça. A l’époque, ils n’ont pas utilisé les canons russes (Acacias 125, Fozdika 120 si j’ai bien noté), fixes ou sur des blindés. Il y en avait assez pour la défense mais on a utilisé les soldats pour des tâches pour lesquelles ils n’avaient pas de formation et ça a causé des dégâts. Quand ils demandaient des renforts on leur disait de se débrouiller. Tous les gradés n’ont pas tiré les leçons nécessaires en temps opportun. C’est une guerre pour laquelle on n’était pas entraîné : pas une guerre de positions comme celle contre Israël pour laquelle on est formé. Toujours le même problème : des endroits où ça a bien fonctionné et d’autres non ».

  Il lui est arrivé de descendre au marché et de voir que des uniformes qu’on leur avait promis étaient en train d’être vendus… « On peut dire que les soldats se sont battus avec leur corps pas avec leur arme ; ils n’ont pas toujours été protégés, surtout dans les combats de rue. A Ghouta (banlieue de Damas) civils et militaires gardaient les barrages ensemble, ils étaient attrapés la nuit par les groupes armés. Quand il y a été, lui, les groupes armés c’était encore encore l’Armée (dite) syrienne (dite) libre, à ses débuts ».

« Pas assez d’information par satellite et communication. Les soldats qui n’étaient pas soutenus par leurs officiers ont tenu parce qu’ils aiment leur président. Hiver 2012, il était aux barrages. C’était difficile avec certains soldats sunnites, parce que quand il y avait des attaques ils pouvaient passer du côté des attaquants. A l’époque ils descendaient sans armes pour encadrer les manifs, ils devaient déposer les armes à la caserne avant de descendre dans la rue ; dans les manifs s’il y avait eu des revendications légitimes, valables, peut-être que ça aurait réussi. Mais les manifestants ne faisaient qu’insulter Assad, les Alaouites et les chiites. Dans les 17 quartiers et banlieues où il est allé à Damas aucune manifestation n’a parlé de corruption, ou de revendications légitimes contre la corruption, ce qui aurait englobé toutes les revendications de base. Ici on a plus de liberté que chez vous [en France] ; ça n’est pas une révolution, c’est de la rancune et de la haine qui sont sorties. En 2012, quand eux [soldats] ont commencé à porter leurs armes, quand il y avait le cessez-le-feu ils avaient ordre de ne pas tirer, sous peine de punition. Les groupes armés ont tiré malgré le cessez-le-feu. Et même quand les groupes armés tiraient sur eux, à balles réelles, les officiers aussi n’avaient pas d’armes pour riposter.

  Ordre du Président.

Il y a des officiers qui n’ont pas obéi à cet ordre, qui n’ont pas laissé leurs soldats descendre sans armes ou sans pouvoir s’en servir. Des officiers sunnites ont laissé leurs soldats armés, et leur ont dit de n’utiliser leurs armes que pour la défense, dans des banlieues de Damas, à Zamalka par exemple.

  A Zamalka, l’ordre était de laisser les gens manifester et tout d’un coup les gens se sont écartés, quelqu’un qui avait le visage couvert a tiré sur les soldats du barrage ; un officier des services secrets lui a tiré dans les jambes pour le faire tomber. Quand le type est tombé il a envoyé son arme aux manifestants qui sont venus le chercher. Et quand les supérieurs de cet officier ont su qu’il avait tiré c’est lui qui a été emprisonné. Pas longtemps, 16 jours, mais puni quand même ».

m-a : l’intervention des Russes ? « Même eux disent qu’ils sont venus un peu tard ». « Avec l’intervention russe, on a plus de moyens ».

Soulagement : c’est le mot que nous entendrons à chaque fois qu’on parle des Russes, partout, par tout le monde.

  Nous sommes restées quatre jours dans la montagne ; avant de partir, le mercredi, nous  allons voir un apiculteur.

Maintenant, il achète les ruches toutes faites mais il y a des usines qui ont fermé, celles qui fabriquaient les fournitures pour l’apiculture (vêtements, machines, extracteurs). Les enfumoirs viennent de Chine ; « avant les Français on mettait de la paille de chanvre, ça sent moins. Les Français ont importé l’habitude de mettre des aiguilles de pin ». Il vend des essaims : avant 2011, 3000 LS l’essaim, maintenant 12 000 LS ; le kilo de miel, avant 2011, 500 LS, maintenant 2000. C’est une moyenne de toutes les qualités produites. Avant ils produisaient 7 sortes de miel, aujourd’hui seulement quatre : agrumes (vers Lattaquié), nigelle, anis, épineux. Avant 2011, 60% de la production nationale venait de la région de Hama.

  « Le cercle des apiculteurs s’agrandit dans la zone, parce que c’est une activité possible aujourd’hui, donc beaucoup de gens se reconvertissent. Beaucoup de gens de la campagne ne travaillent plus ; ils sont allés travailler au Liban et sont revenus, ils n’ont trouvé que ça comme travail à la campagne. Aujourd’hui il y a même des ingénieurs qui font apiculteurs. Autrefois les apiculteurs étaient concentrés à Deraa, c’étaient des spécialistes. Il y en avait aussi entre Khan Sheikhoun et Alep, où les gens faisaient ça de père en fils. Ils exportaient en Europe ; il y avait deux grands exportateurs, dont un public. La production de miel avant la crise était de 36 000 tonnes, maintenant 6 000 ».

  Les ruchers ont été détruits. « Depuis 2015, l’activité reprend à Deraa [sud du pays] mais sans pouvoir faire la transhumance ». Il y a des gens qui achètent et exportent au Liban, au noir : car toute exportation alimentaire est interdite depuis la crise.

   Lui, il continue à faire la transhumance, « je suis les fleurs d’un endroit à l’autre » ; « les paysans alaouites sont les plus généreux, ils laissent mettre les ruches où on veut et ne demandent rien ».

  Et chacune partira avec son kilo de miel…

Dans ces villages le bois des forêts a été coupé, peu à peu, au cours des quatre dernières années. Pour se chauffer, à cause de la pénurie de mazout, plus ou moins organisée par des trafiquants très peu patriotes.

Midi, nous allons partir -toujours en pleine journée- pour la deuxième étape programmée de notre séjour : le monastère de Saint Jacques le Mutilé, à côté de la ville de Qâra, à une centaine de kilomètres d’ici. Nous devons contourner quelques points chauds, où l’Armée syrienne encercle des poches de terroristes. Le monastère est entre les Monts de l’Anti-Liban et la chaîne du Qalamoun où se déroule la grande offensive contre les terroristes depuis le printemps : une des raisons majeures pour lesquelles ce voyage a été ajourné. Le monastère a été sur la ligne de démarcation pendant des mois, et il était inutile d’aller se mettre dans les pattes des combattants.

  Maintenant la situation est plus claire et les terroristes refoulés ou tués ; si nous n’en avons pas (ou très peu) entendu parler en France c’est bien parce que c’était une bataille majeure, menée par l’Armée syrienne et le Hezbollah (la frontière est à 15 Kms du monastère). On dit en Syrie « qui tient le Qalamoun tient le Liban et la Syrie » : bataille capitale donc pour l’Axe de la Résistance. Et  non par hasard passée sous silence par nos braves médias qui nous occupent pendant ce temps avec quelques fausses nouvelles de la guerre, comme l’a enseigné Marc Bloch. Les poches de terroristes du Qalamoun et de l’Anti-Liban ont été nettoyées, tunnel par tunnel, grotte par grotte depuis le printemps, saison traditionnelle des offensives après les replis de l’hiver. Il n’en reste que quelques kilomètres carrés à Zabadani, tout au sud de la chaîne de montagne. On en reparlera.

  La veille j’ai appelé le monastère -le téléphone fonctionne très bien en Syrie- pour vérifier les conditions du trajet ; Claire-Marie nous dit « Basile, Yakoub et Ali viennent vous chercher à midi : sécurité à 1000% ». Soeur Claire-Marie est une personne qui s’en remet à la Providence, et sa confiance est communicative. Finalement c’est G. qui arrive vers 14h, seul. Arithmétiquement, ça nous laissait quand même un bon 300% de sécurité. Thierry Meyssan, que j’ai appelé aussi la veille à Damas, m’avait dit ne partez pas, la route est prise dans des combats violents à certains endroits. Mais puisque G. a pu arriver et nous dit qu’on peut y aller, fions-nous aux informations providentielles du terrain. En cas, on pourra toujours essayer d’adoucir les méchants avec un peu de miel ..?

 Les vacances à la montagne sont finies. Derniers échanges : faites attention (à ceux qui restent); revenez (à celles qui partent). Tabaan (bien sûr) : nous reviendrons et en attendant nous écrirons. Ogni promessa è debito. Et chaque dette une promesse.

Récits du trajet et deuxième étape du séjour dans le prochain épisode. Les éléments rapportés ici sont ce que nous avons entendu, transcrits le plus souvent mot à mot à partir de notes prises en direct, avec les risques d’erreur puis difficultés de déchiffrage.

marie-ange patrizio
psychologue et traductrice
membre de comaguer, comité Comprendre et agir contre la guerre, Marseille
Toutes les photos m-a patrizio. Reproduction en mentionnant l’auteur



[1] Pas tout seuls mais on n’entrera pas dans le détail pour le moment.

[2] http://www.wikiwand.com/fr/Massacre_de_Hama Nous avons aussi entendu de plusieurs personnes que celui qui a dirigé la campagne, Rifaat al-Assad, frère du président Hafez, avait lourdement outrepassé les consignes données par le chef des armées, recommandant la plus grande vigilance et mesure dans la répression.

Marie-Ange Patrizio
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