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Table ronde OTAN

2 mai 2006

Salle des Congrès du Parlement fédéral.

Parlementaires participant à la table ronde : Josy Dubié (Ecolo), Jean-Pol Henry (PS), Christian Brotcorn (cdH), François-Xavier de Donnea (MR).

Avec la participation de Michel Liégeois (politologue UCL), Georges Spriet (Vrede), Claudine Polet (Comité de surveillance OTAN).

Modérateur : Arnaud Ghys (CNAPD).

 

Arnaud Ghys (introduction)

L'Union européenne ambitionne aujourd'hui de « parler d'une seule voix » sur la scène internationale et de se créer une véritable politique étrangère commune.

Pour ce faire, elle présente comme indispensable préalable de se constituer une plus grande autonomie en matière de sécurité et de défense.

Mais quelles distances prend-t-elle par rapport aux doctrines de sécurité américaines et otaniennes ?

Pourquoi vouloir plus d'autonomie si ce n'est pour favoriser un modèle de sécurité différent ?

Quel est ce modèle alternatif européen ? Comment l'Europe entend-t-elle le promouvoir?

Comment contribuera-t-elle à une paix et une sécurité durable ?

Ces question constitueront la toile de fond du débat que nous vous proposons aujourd'hui sur l'avenir de l'OTAN.  

L'OTAN s'est transformée d'un bouclier à une épée, d'une alliance défensive sur le territoire des membres  à une force d'intervention partout dans le monde, parfois même sans mandat du Conseil de Sécurité.

Cette évolution, qui pose pour le moins question, n'a jamais été ratifiée par notre Parlement, qui n'a donc pu donner son accord que sur le bouclier et pas sur l'épée.

 

Claudine Polet

Des questions se posent sur le rôle de l'OTAN et sur l'adhésion de la Belgique à l'Alliance. Ces dernières semaines, la question de la sécurité a occupé une place importante dans les médias. Or, l'adhésion de la Belgique à l'OTAN garantit-elle notre sécurité collective ? Beaucoup de gens pensent que non.

Après la Guerre froide, l'OTAN s'est élargie territorialement et en ce qui concerne ses interventions extra-territoriales. Depuis le 11 septembre, l'OTAN a participé à quatre guerres. Dans le futur, les cibles de l'OTAN pourraient être l'Iran, le Venezuela ou la Bolivie. Dès lors, l'OTAN ne sert pas à la paix, mais à la guerre.

Réponses

Jean-Pol Henry

Aucun Etat ne peut assurer seul sa sécurité dans le monde global actuel. Une sécurité collective est donc nécessaire. L'OTAN a été efficace pendant la Guerre froide. Après 1989, la notion de danger a connu des changements (avec le terrorisme, des groupes mafieux.).

La question qui se pose est dès lors de savoir quand et comment peut intervenir l'OTAN. La réponse est la suivante : uniquement dans le cadre de l'ONU.

Josy Dubié

En Belgique, c'est l'exécutif, pas le parlement, qui est compétent pour les questions de défense. Ecolo voudrait changer cela.

Ecolo a une position nuancée par rapport à l'OTAN.  La charte de 1949, et particulièrement l'article 4, doit être respectée de manière absolue. L'OTAN, qui est aujourd'hui un outil de l'impérialisme américain, devrait être un organisme de défense, dont les membres devraient pouvoir bloquer des interventions. Il faut donc une véritable volonté politique des Etats membres contre l'unilatéralisme américain.

Christian Brotcorn

L'Europe ne court plus de risque d'attaque imminente. Les objectifs et pratiques de l'OTAN connaissent donc des mutations, et l'OTAN remplit des missions que ne prévoyait pas son traité fondateur.

Si l'OTAN intervient à la demande des Nations unies, elle est dans la légalité. Mais un problème vient du fait que l'OTAN n'intervient pas à la demande des parlements, mais des gouvernements.

Le cdH veut un débat sur l'OTAN, particulièrement en ce qui concerne le contrôle démocratique des parlements nationaux et le rôle des Nations unies dans la sécurité collective.

François-Xavier de Donnea

Les menaces sont de plus en plus nombreuses et diversifiées.

Quelle est aujourd'hui l'alternative à l'OTAN ? L'UE n'a pas les moyens nécessaires et n'a pas mis en ouvre une politique digne de ce nom en matière de défense.

L'Alliance Atlantique reste et doit rester une alliance défensive. Mais l'OTAN doit pouvoir aller chercher l'ennemi là où il se trouve.

Pour les opérations de maintien de la paix, il faut avoir l'accord de l'ONU, comme dans le cas du Kosovo, de l'Afghanistan et de l'Irak.

Aujourd'hui, à l'image des catastrophes naturelles, les menaces sont de plus en plus diffuses et globales. L'OTAN doit donc évoluer, en gardant l'esprit qui a présidé à sa fondation, en 1949.

Georges Spriet

Dans les réponses données, on voit apparaître une réflexion sur les menaces diffuses et globales. Depuis 1999 (nouveau concept stratégique de l'OTAN, accepté par le parlement belge) on ne parle plus de défense mais d'intervention. La notion de défense est ainsi étendue et l'idée que les menaces doivent avoir une réponse militaire s'impose.

Si les menaces sont globales, pourquoi faire appel à l'OTAN et pas à l'ONU ? Pourquoi donner des réponses militaires ? L'OSCE est en mesure de fournir un autre type de réponse. Pourquoi accepter la protection américaine et la domination du gouvernement américain, dont l'armée est la plus forte du monde et qui veut jouer un rôle de policier du monde ?

Réponses

Josy Dubié

Pour Ecolo, la sécurité n'est pas que militaire. La prévention, qui doit viser les causes des conflits, est aussi très importante. L'intervention militaire doit être le dernier recours.

Si on veut une politique européenne de défense, de prévention des conflits, il faut s'attaquer aux causes des conflits. Quand il ne reste pas d'autre solution que l'intervention militaire, celle-ci doit être menée avec l'ONU et avec l'autorisation du Conseil de sécurité.

Par ailleurs, l'Union européenne doit mettre en ouvre une politique de défense, de sécurité et de prévention des conflits, en se distanciant des Etats-Unis, car les intérêts des Américains et des Européens sont différents. L'OTAN ne doit pas être l'outil des Etats-Unis, qui ont un plus gros budget de défense que l'UE et des objectifs différents.

Christian Brotcorn

Christian Brotcorn partage les idées de Josy Dubié en ce qui concerne la politique de défense de l'Union européenne. Il faut une Europe de la défense, avec une politique de relations et de coopération internationales. Il faut une capacité d'agir, avec des éléments liés à la défense. L'UE doit-elle se doter d'une politique étrangère digne de ce nom ? Quel doit être le rôle de l'UE par rapport à une stratégie globale ? L'UE doit être autonome par rapport aux Etats-Unis dans le monde et doit pouvoir faire contre-poids aux Etats-Unis.

François-Xavier de Donnea

L'intervention militaire ne peut être que l'arme utilisée en dernier ressort. Pour obtenir une paix stable, il faut élargir l'UE, notamment dans les Balkans. Mais en élargissant, il devient plus difficile d'atteindre un accord en matière de politique de sécurité.

L'OSCE a un rôle très important, notamment en ce qui concerne la démocratie, les droits de l'homme. L'OSCE est un facteur de diplomatie préventive.

Mais il faut aussi une capacité militaire, avec des objectifs défensifs. Il faudrait être en mesure de dialoguer avec les Etats-Unis sur un pied d'égalité, car il n'est pas bon d'avoir un monde avec un acteur militairement dominant.

Il vaut mieux côtoyer les Etats-Unis dans une alliance que les rejeter. Une répartition des tâches est nécessaire en matière de gestion des crises : l'OTAN serait chargée de l'aspect militaire et l'Union européenne de l'aspect civil.

Le défi de l'Union européenne doit être de faire coïncider ses moyens et ses ambitions politiques.

Jean-Pol Henry

Jean-Pol Henry rappelle qu'il est membre de l'assemblée parlementaire de l'UEO. Il croit en l'émergence d'une politique européenne de défense. Certains pays sont en avance, les autres Etats doivent être convaincus.

La meilleure façon de justifier la politique européenne de défense est de montrer que la vision de politique de sécurité des Européens est différente de celle de l'administration Bush. Pour les Européens, le militaire doit venir en dernier lieu. Par ailleurs, le dialogue entre Européens et Américains doit être rééquilibré.

Georges Spriet

Le fait que le concept stratégique de l'OTAN de 1999 ait été accepté par le parlement belge pose problème.

Réponses

Josy Dubié

Josy Dubié était parlementaire en 1999 et il n'y a pas eu de discussion sur le sujet au parlement.

Michel Liégeois

Le traité de 1949 n'a connu aucune modification. Toutefois, sur base du traité, des textes interprétatifs ont été discutés. Des changements ont eu lieu bien avant la fin de la Guerre froide, sous l'impulsion de Pierre Harmel notamment. Aujourd'hui, l'OTAN est davantage une organisation de sécurité qu'une organisation militaire.

En ce qui concerne la notion d'autonomie des Européens par rapport à l'OTAN et aux Etats-Unis, des restructurations pourraient générer des économies, mais pas créer une véritable autonomie militaire. Si on veut une réelle autonomie, les budgets de défense doivent être augmentés.

Le projet de Constitution européenne dotait l'UE d'une clause de solidarité qui n'existe par ailleurs que dans l'OTAN.

La politique de défense de l'UE constitue surtout un outil militaire au service de la politique étrangère. Il n'y a pas vraiment de politique européenne de défense au sens strict et le socle de la défense européenne au sens strict reste l'OTAN.

Claudine Polet

Questions sur les menaces et leur définition, sur la participation éventuelle de l'OTAN à une attaque contre l'Iran, sur le traité secret de 1971 entre la Belgique et les Etats-Unis, qui devait faire l'objet d'un débat parlementaire public sans cesse ajourné, sur la politique d'« abstention constructive » du Ministre belge de la Défense en relation avec l'OTAN.

Réponses

Christian Brotcorn

Les Européens doivent se donner les moyens politiques et financiers nécessaires à une politique étrangère digne de ce nom.

C'est le Conseil de sécurité des Nations unies qui est compétent pour décider quel Etat, quel régime ou quel groupe est une menace ou non. Tout autre type d'intervention ne serait pas acceptable par rapport au droit international.

En ce qui concerne les accords de 1971, il n'y a pas de volonté du gouvernement de les discuter. Christian Brotcorn ne sait pas pourquoi, car il est dans l'opposition.

Une politique d'abstention ne peut être constructive et constitue peut-être une manière de cacher des divergences au sein du gouvernement.

François-Xavier de Donnea

Dans l'immédiat, les menaces planant sur l'Union européenne sont de nature terroriste et écologique.

Les pays qui se sentent menacés et le Conseil de sécurité sont les premiers compétents pour agir. Dans le futur, certains Etats géographiquement proches comme la Russie ou l'Iran pourraient constituer une menace pour des Etats membres de l'OTAN.

Sur l'Iran, c'est l'ONU qui doit trancher.

L'abstention constructive n'existe pas à l'OTAN. Quand la Belgique laisse passer une décision, c'est qu'elle se rallie au consensus.

Il est angélique de croire qu'il n'y aura un jour plus de menace.

Jean-Pol Henry

Au début du mois de juin, un débat sera entamé au parlement sur l'OTAN et la Belgique dans l'OTAN. A ce titre, le rôle de la défense est perçu différemment dans le Nord et le Sud du pays.

Les menaces ne sont pas précises, mais l'Iran doit être surveillé par les Nations unies.

Les accords secrets existeront toujours, dans tous les gouvernements.

L'abstention constructive a été utilisée une fois par André Flahaut contre la guerre en Irak, lors du sommet de l'OTAN à Istanbul. 

François-Xavier de Donnea

Louis Michel a expliqué en 2003, au parlement, le contenu des accords secrets de 1971, devant très peu de parlementaires.

Christian Brotcorn

Le Sénat pourrait s'occuper particulièrement des affaires de défense.

Josy Dubié

La principale menace trouve son origine dans la scandaleuse distribution des richesses.

La deuxième menace concerne les conflits non résolus, comme en Palestine ou entre l'Inde et le Pakistan.

Ce sont les principales causes du terrorisme.

L'Iran constitue un problème et une menace. C'est l'ONU et le Conseil de sécurité (qui doit être réformé) qui sont compétents en ce qui concerne les menaces pour la paix.

L'OTAN devient un substitut, en l'absence d'une force militaire des Nations unies, qui n'a pas vu le jour (alors qu'était prévue).

L'accord secret de 1971 doit être rediscuté. Le gouvernement belge doit pouvoir empêcher le passage des forces américaines sur son territoire.

L'abstention constructive est un oxymore et ne peut exister. Il faut prendre une décision, pas s'abstenir.

Michel Liégeois

Des questions se posent sur le rôle du Conseil de sécurité. Il est composé d'une certaine manière, qui n'est pas démocratique et le rend peu représentatif. Dans le cas de l'Iran, le moment venu, le Conseil va se diviser et être paralysé. Faut-il rester dans le cadre légal et ne pas intervenir, ou intervenir en sortant du cadre légal, au nom d'un autre principe ?

La Belgique sera membre du Conseil de sécurité en 2007, elle doit donc se positionner.

Josy Dubié

C'est vrai, mais il existe un risque de justifier une guerre préventive.

Georges Spriet

Le rôle du nucléaire au sein de l'OTAN est décisif, notamment à cause de la notion de « first strike » qui prévaut. Par ailleurs, il y a des bombes atomiques sur le sol belge, à Kleine Brogel.

Réponses

François-Xavier de Donnea

L'arme atomique existe et des pays qui ne l'ont pas s'acharnent à l'acquérir. L'OTAN peut-elle se priver de l'arme atomique ? La capacité nucléaire de l'OTAN a été diminuée après 1989.

La logique actuelle n'est pas celle de la Guerre froide. Il existe une notion de martyr, qui fait que la dissuasion nucléaire pourrait ne pas fonctionner avec certains régimes.

Si la Belgique quitte l'OTAN, elle se met en marge. Sa présence au sein de l'Alliance est positive, en tant que pays pacifiste.

François-Xavier de Donnea n'est donc pas partisan d'un désarmement unilatéral.

Jean-Pol Henry

Il s'oppose à un désarmement nucléaire unilatéral. Dans l'OTAN, il faut faire preuve de solidarité et accepter la présence d'armes nucléaires en Belgique.

Josy Dubié

La Belgique viole le traité de non-prolifération en ayant des armes nucléaires sur son territoire. Dans le même temps, on demande une non-prolifération.

Aux Etats-Unis, un budget important est consacré aux « mini-nukes », dont la puissance est tout de même trois à quatre fois supérieure à la bombe d'Hiroshima. On fait du nucléaire une arme presque conventionnelle. C'est inquiétant, car le nucléaire pourrait être utilisé en cas de difficulté militaire, comme ce sera certainement bientôt le cas pour les Etats-Unis en Afghanistan. L'incohérence de l'administration Bush avec l'arme atomique est totale.

Ceux qui ont signé le traité de non-prolifération doivent l'accepter chez eux.   

Christian Brotcorn

Il faut arriver à une interdiction complète de l'arme atomique, par la diplomatie et non unilatéralement.

 

Rapport rédigé bénévolement par François Graas

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