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L'Afghanistan est notre défi Rainer Braun 21 juin 2008 L'Allemagne, le pays où nous vivons, nous travaillons, et nous votons, est en train de mener une guerre.
Depuis plusieurs années, l'Allemagne participe à un conflit militaire dans un pays étranger avec environ 3.500 militaires, à 9000 km de l'Allemagne. C'est la plus longue et la plus vaste opération militaire des 60 dernières années de ce pays.
Et pourtant : La guerre ne joue pratiquement aucun rôle dans la vie des gens en Allemagne. La vie suit son "cours normal" avec ses succès, ennuis, désirs et besoins de chaque jour. L'Afghanistan pourrait devenir le "Vietnam de l'Allemagne". On ne le réalise pas, mais au contraire la classe politique et les médias occultent et vendent cette guerre comme "argument de paix".
Le peuple allemand est de manière constante contre cette intervention militaire ; les sondages indiquent qu'autour de 70% d'Allemands sont opposés à cette guerre. A la lumière des mensonges des politiques et de la propagande des médias, on ne peut suffisamment souligner ce désir de paix. C'est un signe de l'ardant désir de paix du peuple. Cela a beaucoup à voir avec l'expérience historique, et avec les nombreuses années de travail du mouvement pour la paix.
Et pourtant : il n'y a pas eu jusqu'à présent de grandes manifestations comme on en a vues en février 2003 contre l'agression de l'Irak, ou toute autre forme d'opposition. Le mouvement pour la paix a travaillé pour attirer l'attention sur la question de cette guerre, bien qu'il soit encore loin d'avoir utilisé toutes les initiatives. Nous avons estimé qu'une manifestation nationale réunissant de 10 à 15 milles personnes, était un début réussi pour l'action.
Il n'est pas dans mes intentions de donner une leçon au "public", mais plutôt de décrire une pénible réalité. La reconnaissance de la réalité est absolument nécessaire pour la changer et développer une stratégie pour des actions couronnées de succès à l'avenir.
Et ceci s'applique aussi lorsqu'on décrit cette réalité : La paix en Afghanistan et le retrait des troupes d'occupation, est la tâche la plus intimidante à laquelle nous sommes confronté.
Nous ne travaillons pas seulement pour agir contre la souffrance continue du peuple afghan, plongé depuis 30 ans dans la guerre. Non, nous nous battons également contre l'Otan, et donc contre les pouvoirs dirigeants fauteurs de guerre, c'est à dire les USA qui sont au centre de la chaîne politique et idéologique.
Idéologiquement, la guerre en Afghanistan a été l'élixir pour le mensonge qu'est la "Guerre à la Terreur", laquelle a dominé le débat politique et médiatique sur toute la terre depuis le 11 septembre. Cette "guerre à la Terreur" a mené à une massive dé-démocratisation à l'échelle mondiale, et à un recul des libertés dans presque tous les pays, ainsi qu'à la légitimation de presque n'importe quel crime, pour la torture et la guerre. L'offensive intellectuelle de l'empire a été un lavage de cerveau brutal, dont les effets peuvent même être observé dans notre travail pour la paix.
Politiquement parlant, nos efforts ont visé "le coeur du nouvel ordre impérial mondial". Les voies pour transporter le pétrole et le gaz passent à travers l'Afghanistan, non seulement du Nord au Sud, mais aussi de l'Est à l'Ouest. C'est un pays de transit pivot. Ce pays cruellement éprouvé est aussi le porte-avion "insubmersible" pour surveiller les nouvelles super-puissances que sont la Chine et l'Inde, ainsi que la Russie et les républiques associées. A côté du Moyen-Orient, cette région est certainement la plus sensible, politiquement, économiquement et militairement. D'avantage d'informations peuvent être trouvées dans les textes de Brzezinski.
Militairement, on se lève contre l'opération de guerre la plus importante de l'alliance militaire la plus moderne et la mieux équipée au monde : l'Otan. Pour l'Otan, cette guerre est d'une part la mise en application d'une stratégie agressive pour sécuriser les matières premières, et d'autre part elle est une justification de son existence dans l'après guerre froide. Mais il y a plus. Les opérations de l'Otan sont le premier exemple réel de la stratégie de l'Otan discutée à Bucarest. L'objectif réel est de développer l'Otan en une alliance militaire mondiale suivant une expansion vers l'Est. Cela signifie que nous sommes en train de travailler contre un complexe militaro-politique international, et contre un complexe politico-médiatique associé.
En Allemagne, cela signifie que nous nous battons contre la très large coalition des partisans de la guerre, qui, à l'exception d'une petite minorité de membres, comprend également le SPD (les sociaux-démocrates) et le partit Vert. C'est pourquoi il faut souligner encore d'avantage les positions en faveur de la paix de "die Linke", comme il doit être régulièrement défendu contre un "ramollissement" dans le mouvement pour la paix. Idéologiquement, cela signifie une lutte continue contre l'argument, qui est aussi colonial, que l'Afghanistan trouvera seulement le chemin de la paix avec notre aide civilo-militaire. Ceci inclus l'usage inapproprié et la transformation des termes de paix qui ont des connotations positives, en des arguments et des justifications pour la guerre. Cela se passe également en partie avec l'aide d'organisations civiles. Un véritable travail de préparation est en train d'être fait, sur lequel on met l'accent encore et encore, comme un moulin à prière : on continue toutefois à éviter une évaluation complète et indépendante du succès ou de l'échec après 7 ans de destructions et de mort.
En plus, il faut mentionner que la coalition politique en faveur de la guerre est cautionnée et soutenue par un pouvoir des médias dans lequel il y a de moins en moins de place pour des journalistes d'investigation éclairés, si ce n'est une niche ridicule. Les médias sont le 4e pouvoir, oui mais du côté des politiquement puissants. Les illusions à ce sujet ne nous aiderons pas.
Cependant, citer les contre-pouvoirs est aussi une partie de la dialectique de l'observation de la réalité.
Ceux-ci incluent:
- Le désir (mondial) de l'Humanité pour la paix
- L'expérience historique qu'en Afghanistan une guerre gagnée par les forces occupantes est encore à venir
- Les conditions économiques et sociales en train de se dégrader dans notre pays même
- Les contradictions à l'intérieur du bloc impérialiste, y compris entre les USA et l'Europe, également en rapport avec les tactiques militaires et diplomatiques.
- La crise de l'Otan, qui a été causé par de multiples facteurs (notamment la politique unilatérale des USA)
- Le large plaidoyer des Nations Unies en faveur d'une politique internationale respectant le droit international
- Le désastre en Irak, en particulier pour les USA, et l'image négative associée aux USA auprès de larges portions de la population mondiale.
Et pourtant : la guerre se poursuit chaque jour en Afghanistan.
Le 20 septembre 2008 aura lieu en Allemagne (à Berlin et à Stutgart) une grande manifestation nationale réclamant le retrait des troupes allemandes d'Afghanistan.
Les participants à la conférence ont décidé d'organiser un transport en autocar vers Stutgart à partir de Bruxelles.
Des informations plus précises et formulaire d'inscription seront publiés sur le site du CSO. Contactez-nous pour plus de renseignements : info@csotan.org |
Retirer les troupes d'occupation
Personne n'a un plan magistral pour la paix en Afghanistan. Ce qui est vrai, c'est que le retrait de toutes les troupes étrangères (y compris les opérations des services secrets), est le prérequis et le coeur de toute solution. Il va de soi que le retrait doit être sécurisé civilement et financièrement (réparations, aide à la reconstruction)
Les idées de paix devraient toutefois être surtout initiées par les forces sociales en Afghanistan et dans la région (associations de femmes, ONG), lesquelles forces sont souvent marginalisées aujourd'hui. Des tentatives d'instiller la paix dans des régions individuelles ou de plus petites zones du pays seraient certainement également intéressantes.
Une nouvelle "Jirga" indépendante, ou d'autres structures pour développer la paix qui incluraient toutes les forces sociales en Afghanistan, en collaboration avec les Nations Unies, devraient décider si le retrait des troupes d'occupation doit être sécurisé par d'autres troupes (d'états plus petits, ou des casques bleu) contre les Warlords et autres fauteurs de guerre.
Cependant ce qui suit s'applique aussi à ces "forces de maintien de la paix" : Au mieux, une force militaire peut limiter ou peut-être même prévenir la violence pendant la durée de sa présence. Elle ne peut résoudre ou mettre fin à un conflit, ni à des cycles de violence. Cela, ça requiert des changements fondamentaux sociaux et économiques, l'émancipation et la participation de la population, et la préservation de l'environnement.
Les réflexions civiles sur le résolution des conflits et les stratégies de sortie sont utiles pour trouver le meilleurs chemin vers la paix et pour terminer les conflits sans guerre ni hégémonie impériale.
Le retrait des troupes d'occupation demeure une condition fondamentale. Le mouvement pour la paix devrait concentrer toute son énergie sur cet objectif.
Travailler en direction de la paix
A mon avis, les activités du mouvement pour la paix en Allemagne devraient être centrées sur le rejet d'une extension du mandat militaire allemand en automne 2008, avec l'objectif d'amener un plus grand nombre de membres du Bundestag à voter Non à une extension du mandat.
Ceci inclut selon moi un argument fondamental : Nous devons arrêter de penser en terme d'approches militaires et parvenir à une massive réhabilitation des approches civiles. Cela deviendra certainement plus facile si nous travaillons d'avantage à avoir un ou plusieurs rapports d'évaluation exhaustifs sur l'implication en Afghanistan à présenter au Bundestag et au public. Ceci est aussi un appel aux organisations civiles représentées en Afghanistan, pour qu'elle fournissent des rapports fiables. Nous pouvons peut-être aussi travailler à un rapport d'évaluation issu du mouvement pour la paix, qui serait un résultat du congrès de juin.
Il est nécessaire d'avoir un meilleur réseau international reliant les activités pacifistes sur l'Afghanistan dès cet automne.
La grande force du mouvement pour la paix réside dans sa décentralité, et son ancrage dans la société. Nous devons rendre le débat sur l'Afghanistan à la société dans son ensemble. Cela seulement produira des impulsions qui changeront également le comportement de membres du Bundestag. Des centaines de petits événements, des tournées de conférence, et des pétitions pour la paix adressées au Bundestag sont certainement des pièces importantes dans la construction de ce mouvement. Il faut tenter à nouveau, avec un effort accru, de mener des discussions avec les citoyens; ces discussions avaient fondamentalement changé le climat dans notre pays en ce qui concerne la politique de paix avec la récolte de signatures pour l'Appel de Krefelder.
Des manifestations à Berlin et ailleurs demeurent essentielles en regard de l'extension du mandat militaire. Cela impliquera d'épuiser toutes les possibilités, en particulier au niveau fédéral, et d'utiliser vraiment toutes les approches et toutes les chances pour gagner des forces critiques du côté de la paix, provenant des syndicats, des églises, du SPD et des Verts.
On devrait discuter en profondeur de la pertinence d'une nouvelle initiative du genre "Remettre la priorité au Civil, et retour à la loi internationale"
Beaucoup de nos amis des autres mouvements sociaux n'ont pas encore été gagnés pour agir contre la guerre en Afghanistan. Refouler les forces de guerre et du néolibéralisme est de notre intérêt à tous, également parce qu'un succès pour la paix améliorerait significativement les conditions d'action pour les mouvements sociaux.
En résumé, nous savons que nos efforts sont principalement dirigés vers des succès à moyen et long terme. Cela dépendra de notre détermination et de notre endurance. Modifier la prise de conscience du peuple et des forces sociales, souvent dans un contexte international, requiert une action de masse sur des sujets politiques. C'est la seule façon de parvenir à une victoire de la paix sur les forces de la guerre.
Reiner Braun
CEO of IALANA
un des portes-parole de Cooperation for Peace.
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