[Traduit par Jean-Marie Flémal]
Ramsey Clark, ancien secrétaire d’Etat américain à la Justice et co-président du Comité international pour la Défense de Slobodan Milosevic (CIDSM), y est allé de cette déclaration cet après-midi :
La législation internationale stipule que toute personne accusée d’un délit quelconque a le droit de se représenter personnellement face au tribunal qui traite son cas. Slobodan Milosevic ne fait nullement exception à cette règle. La chambre de jugement du Tribunal criminel international pour l’ancienne Yougoslavie a sabordé ses dernières prétentions à la légalité en tentant de priver l’ancien président de la Yougoslavie de ce droit de l’homme fondamental.
La comparution du président Milosevic, qui s’est représenté lui-même durant le procès qui dure depuis plus de deux ans, soit presque 300 journées d’audience, qui a contre-interrogé presque 300 témoins à charge, affronté quelque 500.000 documents, 30.000 pages de retranscriptions du procès, puis, au tout début de la présentation de sa propre défense, a été réduit au silence et s’est vu imposer des avocats qu’il récuse et qui doivent prendre sa destinée en charge, est une injustice flagrante.
Le président Milosevic a présenté lui-même avec vigueur sa déclaration d’ouverture de sa propre défense en deux journée, les 31 août et 1er septembre 2004, juste avant que le tribunal ne décide qu’il « n’est pas suffisamment en état de se représenter lui-même ». « En état », apparemment, il l’était suffisamment pour accomplir cette tâche. Si le temps vient où des médecins dignes de foi, y compris les siens, estiment qu’un rythme plus lent est nécessaire pour protéger sa santé, ou que tout effort supplémentaire de sa part, en ce moment, peut altérer sa santé, dans ce cas, la seule éventualité acceptable est de suivre un emploi du temps qui fasse honneur à son droit à se défendre lui-même en personne et qui protège ses capacités à le faire. La vie, la vérité et la justice importent davantage que les horaires des tribunaux ou des chemins de fer.
Les avocats mêmes désignés par le tribunal ont un conflit direct d’intérêts. Ils ont joué le rôle, en étant désignés par la cour, d’amici curiae. On ne peut servir deux maîtres. En ayant été des amici curiae, ces mêmes conseillers choisis par le tribunal pour représenter le président Milosevic ne peuvent moralement lui servir de conseillers.
Aucun avocat pouvant être désigné pour représenter le président Milosevic n’a interviewé ses témoins, ne connaît les témoignages qu’ils peuvent fournir, ni les questions qu’il faut leur poser, ni ne sait quelles pourraient être leurs réponses. La préparation professionnelle – et ceci n’a rien d’un cas ordinaire – exigerait des mois de travail.
Le tribunal doit abandonner cette parodie de justice et accomplir son devoir de façon responsable, en tenant compte de la santé de l’accusé pour auditionner les preuves, dégager les faits et appliquer la loi avec crédibilité et compétence, en toute indépendance et impartialité.
Ramsey Clark
New York
2 septembre 2004