Nous présentons ici l’exposé prononcé lors de la récente réunion du réseau international « No to Nato » par Gojko Raicevic, président du réseau monténégrin Ne u rat, ne u Nato, (« Non à la guerre, non à l’OTAN »). Ce réseau est un nouveau membre du réseau international, dont la réunion annuelle s’est tenue à Gand du 10 au 12 mars. Nous nous réjouissons d’autant plus de la venue de cette organisation que le Monténégro pourrait devenir, dès l’an prochain, le prochain nouveau membre de l’OTAN. Ceux qui comprennent le serbo-monténégrin peuvent consulter son site, www.neunato.net.
Le Monténégro, ancienne république yougoslave, est le plus petit Etat slave, plus de deux fois plus petit que la Belgique et, avec 630 000 habitants, près de 20 fois moins peuplé. Le pays a proclamé son indépendance en 2006, après un référendum truqué soutenu par les centres du pouvoir d’Europe occidentale et des Etats-Unis. L’idée d’un Monténégro indépendant va à l’encontre de la volonté des citoyens. La séparation du Monténégro de la Yougoslavie est un projet préparé depuis longtemps, résultant de la désintégration successive de la Yougoslavie socialiste (RSFY), de la « petite » Yougoslavie (RFY) et de l’union Serbie-Monténégro. Dans ce processus, le rôle majeur est revenu à l’OTAN, qui a injustement agressé et occupé des territoires de l’ex-Yougoslavie, afin de les soumettre et de les transformer en colonies. Malheureusement, les objectifs de cette machine de guerre meurtrière sont pour la plupart atteints, sauf en Serbie centrale et au Monténégro. Une partie de la Serbie, sa partie la plus importante même, le Kosovo, est sous le contrôle absolu de l’OTAN et de terroristes albanais déguisés en politiciens depuis 1999.
Il y a quelque temps, le parlement de la République de Serbie a adopté une résolution de neutralité militaire ; une telle décision est un encouragement à tous les mouvements et toutes les initiatives antimondialistes de par le monde, ainsi qu’au Monténégro. Mais, malgré cela, malgré la détermination d’une grande majorité de la population, le régime au pouvoir au Monténégro s’accroche à son projet d’adhérer à l’OTAN.
Rappelons la campagne de mensonges sur les soi-disant crimes serbes contre les Albanais du Kosovo qui ont précédé l’agression de l’OTAN contre l’Etat souverain de Yougoslavie en 1999. Quatorze ans plus tard, les principes de tromperie et de mensonge établis par l’OTAN continuent à être appliqués aujourd’hui par le régime monténégrin. Les représentants diplomatiques des Etats de l’OTAN, alliés au leadership corrompu du Monténégro et à des individus plaçant leurs intérêts personnels au-dessus des valeurs de la civilisation, répandent des mensonges sur de soi-disant avantages qui seraient accordés au Monténégro s’il adhère à l’Alliance.
Comme l’OTAN a collaboré et s’est alliée avec l’organisation terroriste dite « Armée de libération du Kosovo » pour commettre des crimes en Yougoslavie, elle a maintenant établi une alliance avec les autorités nationales monténégrines. De nombreux scandales de corruption, l’absence de démocratie, la situation sociale et politique instable n’ont pas empêché l’OTAN d’en faire leurs partenaires.
En 1999, les pays membres de l’OTAN et leurs leaders se sont rendus coupables de violations grossières de la Charte de l’ONU, de l’Acte final d’Helsinki de l’OSCE, et de nombreuses autres conventions, représentant un crime contre la paix et contre l’humanité. Ils sont responsables de la mort de milliers de personnes, aux deux-tiers des civils, l’utilisation d’armes prohibées, comme des missiles à l’uranium appauvri, des bombes à fragmentation et des armes chimiques, ayant provoqué une contamination permanente du sol, de l’eau et de l’air, et des dommages économiques de plus de 100 milliards de dollars.
Les pays membres de l’OTAN et leurs leaders sont responsables de ne pas avoir empêché la destruction de monuments culturels au Kosovo, notamment 150 églises et monastères médiévaux, dont beaucoup étaient sous la protection de l’UNESCO. La culmination de cette inertie a été la déclaration illégale et unilatérale de l’indépendance par le Kosovo le 17 février 2008 et la reconnaissance de cette création de l’OTAN, à la fois par l’OTAN et par l’Union européenne, à l’exception de la Grèce, la Roumanie, l’Espagne, la Slovaquie et Chypre.
Les conséquences de cette guerre, une énorme erreur historique, se feront sentir tout au long du XXIème siècle en Europe. L’Occident devra admettre cette erreur pour éviter un déclin, notamment moral, encore plus grand. Avec l’aide pernicieuse de l’Occident, le Kosovo, dirigé par des terroristes et des réseaux de trafiquants de drogue, est devenu le tremplin de l’extrémisme islamique et représente la plus grande menace à la paix et à la stabilité en Europe.
Neutralité militaire du Monténégro
La question de la possible entrée du Monténégro dans l’OTAN est un problème géopolitique substantiel allant bien au-delà de l’aspect sécuritaire et affectant toute la vie politique et sociale du Monténégro.
Alors que l’évolution vers un système mondial multipolaire est en pleine accélération, les Etats-Unis demeurent, pris individuellement, la force dominante, mais leur puissance n’est plus absolue comme dans la période précédente. Cet affaiblissement du pouvoir étatsunien, allant de pair avec le renforcement d’autres forces, va continuer et se reflète déjà dans ses relations avec l’Europe, y compris les Balkans. La transition entre un monde unipolaire, établi après la chute du Mur de Berlin, et un système multipolaire correspond au déplacement du centre économique mondial du nord de l’Atlantique vers le Pacifique, en particulier la côte asiatique et la Chine. Les pays du BRICS ont, en effet, une importance croissante dans les relations internationales, grâce à leurs ressources en capital. La crise économique mondiale marque la fin du système économique néolibéral.
En restant en dehors de l’OTAN, le Monténégro aurait des marges de manœuvre. Il pourrait suivre le développement de la situation dans l’environnement international et maintenir sa neutralité. Ce principe est la seule solution rationnelle aux fluctuations d’identité causées par le phénomène de mondialisation. Ce qui est possible pour la Suisse l’est aussi pour le Monténégro.
Le Monténégro est la plus petite des anciennes républiques yougoslaves. Il ne s’agit pas d’un territoire stratégiquement très important. Mais il comporte le dernier coin de la Méditerranée, à l’exception du cas confus de la Syrie, qui échappe encore au contrôle de l’OTAN. À l’inverse de leur gouvernement, les citoyens monténégrins ne soutiennent pas l’intégration dans l’OTAN et même s’y opposent. Les raisons en sont diverses. Certaines personnes ont gardé de mauvais souvenirs de l’agression contre la Yougoslavie en 1999. D’autres ont de la sympathie pour la Russie et sont conscients que l’OTAN est son ennemi latent. Certains y sont opposés pour des raisons écologiques. D’autres, enfin, parce qu’ils ne veulent pas appartenir à une alliance militaire agressive. Plus de 40 ONG de diverses obédiences, de nombreux intellectuels indépendants et quelques organisations informelles se sont unies dans un réseau, Ne u Nato (« non à l’OTAN » et travaillent sincèrement à la défense des droits humains de tous les citoyens, y compris leur droit de ne pas aller en guerre pour les intérêts des Etats-Unis et de ses multinationales.
Notre réseau est radicalement opposé à la politique officielle du régime monténégrin et à son intention de faire adhérer le Monténégro à l’OTAN, malgré la volonté de ses citoyens. Les responsables de l’OTAN à Bruxelles admettent, dans leurs déclarations, que plus de 50 % de la population monténégrine résistent ouvertement à cette intégration.
Nous avons donc établi des médias non soumis à l’influence des structures criminelles de l’Etat, un Etat prêt à tout, y compris à pousser son peuple dans une guerre pour préserver les fortunes personnelles de ses dirigeants. Ces médias libres sont le portail d’information IN4S (www.in4s.net) et le site du réseau Ne u Nato (www.neunato.net). Ces deux sites sont devenus très influents, en particulier pour animer la campagne anti-OTAN. Nous insistons aussi sur l’adoption d’un statut de neutralité pour le Monténégro et nous pensons que plusieurs couches de la société peuvent s’identifier à cette campagne.
Nous voulons établir de plus étroites relations avec des organisations similaires de la région et en Europe et collaborer avec elles sur base de nos intérêts communs à combattre la machine de guerre et à refuser que les citoyens soient forcés à l’intégrer. Nous sommes ouverts à des actions communes, des conférences, des table-rondes, des pétitions et tous types de résistance non-violente, dans le but de stopper l’expansion de l’OTAN et même de la démanteler.
Nous sommes conscients de l’urgence d’agir, car le Monténégro pourrait être invité à adhérer à l’OTAN lors du prochain sommet, prévu en 2014. Nous attendons du réseau international « No to Nato » qu’il nous soutienne pour empêcher cette adhésion.
Je me permets donc, au nom des organisations que je représente, de lancer un appel à l’aide. Je suis sûr que, ensemble, nous pouvons arrêter le processus d’intégration dans l’OTAN du Monténégro et d’autres pays, par exemple l’Irlande qui pourrait également être invitée.
Ma conviction est basée sur le fait que plus de la moitié de la population monténégrine est opposée à cette adhésion. Le soutien d’environ 30 % de la population est le résultat du système répressif du gouvernement et d’une campagne intensive dirigée par des diplomates de pays de l’OTAN disposant d’énormes ressources pour formater l’opinion publique sur la base de mensonges et de tromperies.
En tant que membre d’un réseau national et d’un réseau international disant tous deux « non à la guerre, non à l’OTAN », et en tant que citoyen du monde, je suis persuadé que nous célébrerons bientôt la victoire de la neutralité militaire du Monténégro.