Les destructeurs de la Libye maintenant “pour la Libye”
Source : il manifesto Manlio Dinucci 13 novembre 2018 Un croissant de lune (symbole de l’islamisme) dessiné comme un hémisphère stylisé qui, flanqué d’une étoile et des mots “for/with Libya” (pour/avec la Libye), représente “un monde qui veut se mettre du côté de la Libye” : c’est le logo de la “Conférence pour la Libye” organisée par le gouvernement italien, comme le montre le drapeau tricolore dans la partie inférieure du croissant de lune/hémisphère. La Conférence internationale se déroule les 12-13 novembre à Palerme, dans cette Sicile qui il y a sept ans a été la principale base de lancement de la guerre par laquelle l’Otan sous commandement USA a démoli l’État libyen. Cette guerre démarrait en finançant et armant en Libye des secteurs tribaux et des groupes islamistes hostiles au gouvernement de Tripoli et en infiltrant dans le pays des forces spéciales, parmi lesquelles des milliers de commandos qatari camouflés en “rebelles libyens”. Puis était lancée, en mars 2011, l’attaque aéronavale USA/Otan qui a duré 7 mois. L’aviation effectuait 30 mille missions, dont 10 mille d’attaque, en employant plus de 40 mille bombes et missiles. L’Italie, par la volonté d’un vaste ensemble politique allant de la droite à la gauche, participait à la guerre non seulement avec son aéronautique et sa marine, mais en mettant à disposition des forces USA/Otan 7 bases aériennes : Trapani, Sigonella, Pantelleria, Gioia del Colle, Amendola, Decimomannu et Aviano. Avec cette guerre de 2011 l’Otan démolissait cet État qui, sur la rive sud de la Méditerranée face à l’Italie, avait atteint, fut-ce avec de notables disparités internes, “de hauts niveaux de croissance économique et développement humain” (comme le documentait en 2010 la Banque Mondiale même), supérieurs à ceux des autres pays africains. En témoignait le fait qu’avaient trouvé du travail en Libye environ deux millions d’immigrants, le plus souvent Africains. En même temps la Libye aurait rendu possible, avec ses fonds souverains, la naissance en Afrique d’organismes économiques indépendants et d’une monnaie africaine. USA et France -comme le prouvent les emails de la secrétaire d’état Hillary Clinton- s’étaient mis d’accord pour bloquer avant tout le plan de Kadhafi de créer une monnaie africaine, alternative au dollar et au franc CFA imposé par la France à 14 ex-colonies africaines. Après la démolition de l’État et l’assassinat de Kadhafi, dans la situation chaotique qui s’en est suivie, a commencé, sur le pan international et interne, une lutte au couteau pour la partition d’un énorme butin : les réserves pétrolifères, les plus grandes d’Afrique, et de gaz naturel ; l’immense nappe nubienne d’eau fossile, cet or blanc en perspective plus précieux que l’or noir ; le territoire libyen même, de première importance géostratégique ; les fonds souverains, environ 150 milliards de dollars investis à l’étranger par l’État libyen, “gelés” en 2011 dans les plus grandes banques européennes et étasuniennes, en d’autres termes volés. Par exemple, des 16 milliards d’euros de fonds libyens, bloqués dans la Euroclear Bank en Belgique et au Luxembourg, plus de 10 ont disparu. “Depuis 2013 -documente la RTBF (radiotélévision francophone belge)- des centaines de millions d’euros, provenant de ces fonds, ont été envoyés en Libye pour financer la guerre civile qui a provoqué une grave crise migratoire”. De nombreux immigrés africains en Libye ont été emprisonnés et torturés par les milices islamiques. La Libye est devenue la principale voie de transit, aux mains des trafiquants et opérateurs internationaux, d’un chaotique flux migratoire qui en Méditerranée a provoqué chaque année plus de victimes que les bombes Otan en 2011. On ne peut pas taire, comme l’ont fait même les organisateurs du contre-sommet de Palerme, qu’à l’origine de cette tragédie humaine on trouve la guerre USA/Otan qui, il y a sept ans, a démoli en Afrique un État entier.
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