L’Afghanistan est nettement moins médiatisé que l’Irak et
pourtant c’est bien une guerre avec son cortège de morts, de blessés, de famine,
de destructions de villes, de villages, la fuite de millions d’habitants à
l’extérieur du pays. En Belgique, un groupe d’Afghans font la grève de la faim
dans l’église des Minimes à Bruxelles pour obtenir le statut de réfugié. Comme
le gouvernement belge intervient soi-disant en mission humanitaire, il ne peut
pas reconnaître qu’il existe des réfugiés. Donc ces immigrés viennent uniquement
profiter de l’hospitalité belge. C’est extraordinaire : plus l’OTAN
intervient humainement plus les gens fuient le pays !
Jusqu’à présent, les troupes belges n’ont pas perdu un seul militaire, la
principale raison de leur sécurité est que les Belges se terrent dans des
casemates autour de l’aéroport, ne sortent jamais dans Kaboul de peur d’être une
cible pour les résistants afghans.
Deux avions F16 de la force aérienne belge sont basés dans le pays, ils
participent au bombardement et au mitraillage des villages et des populations.
Pour notre ministre de la Défense, le plomb nourrit, cela va très bien avec la
mission humanitaire.
Jusqu’à ces dernier temps, seuls les contingents US, Britanniques et
Canadiens sont impliqués dans des opérations de guerre, et comme corollaire,
c’est eux qui ont le plus de pertes. Après la réunion de l’Otan à Riga, tous les
membres de l’OTAN doivent aller au feu. ISAF est heureux d’annoncer la
participation de l’ensemble des troupes de l’OTAN dans une tentative de
reconquête d’une des provinces hors contrôle. Il semble donc que l’on va doubler
les forces d’occupation.
Les USA et l’ISAF ne peuvent absolument pas faire confiance aux soldats
afghans. Pendant la visite de Cheney, un attentat suicide s’est produit. La base
est pourtant protégée par trois enceintes militaires. La première enceinte est
tenue par les soldats afghans, ceux-ci ont laissé passer le kamikaze qui a
explosé sur l’enceinte tenue par les boys US, il n’était pas loin de Cheney.
Plus la violence augmente, plus cela démontre l’incapacité de gagner la
guerre. La défaite de l’OTAN est inéluctable, mais quand aura-t-elle lieu et
après combien de destructions ? Le gouvernement belge se plaint de
l’absence de « stratégie pour sortir d’Afghanistan » de la part de
l’Otan. Mais en attendant, il augmente la participation des troupes belges et sa
contribution financière. Il faut prendre l’initiative contraire : retirer
les troupes belges et les avions F-16 et supprimer ce soutien financier aux
opérations de l’Otan en Afghanistan qui n’ont rien d’humanitaire !
Marcel Poznanski
Nous publions ci-dessous une partie
de « la demande d’explication de Josy Dubié au ministre de la Défense sur
l’accroissement de la présence militaire belge en Afghanistan ». Le texte
complet de la demande et de la réponse ministérielle peut être lu sur le site
à l'adressewww.csotan.org/textes/doc.php?art_id=332&type=documents
Séance du Sénat de Belgique – 25 janvier 2007
M. Josy Dubié (ECOLO). - Je relève donc que
la note d'orientation prévoit une augmentation de nos effectifs de 310 unités
à 420 à la fin de l'année, ce qui correspond bien à une augmentation de 35% de
notre effectif militaire sur place, sans compter les quatre F-16.
Je suis
très surpris de cette réponse extrêmement contradictoire avec une interview
publiée dans Le Vif/L'Express, il y a deux mois, le 24 novembre 2006. Sous le
titre : « Flahaut :"on est piégé !" », le ministre
dénonçait « l'explosion des dépenses causées par le bourbier
afghan ». « La fuite en avant m'inquiète », disait le
ministre.Deux mois plus tard, il propose au conseil des ministres une
augmentation de 35% de nos effectifs militaires.
Dans l'article
susmentionné, il disait pourtant : « Les opérations de l'Alliance en
Afghanistan sont déjà moins aisées à justifier ». Je suis d'ailleurs un
de deux qui s'interrogent. Il poursuivait : « Si la situation sur le
terrain tournait mal, c'est moi, ministre de la Défense, qui serait mis en
cause », ce qui me semble assez évident.Mais je relève surtout
ceci : « J'ai demandé des explications à propos de l'augmentation
énorme du budget affecté à la mission en Afghanistan. On se contente de me
répondre que l'on ne peut pas tout prévoir quand on lance ce genre
d'opération. On est piégé, car les projections budgétaires sont inexistantes
ou imprécises. Faute de "stratégie de sortie", comment la Belgique peut-elle
planifier son engagement ? »
Ces affirmations du ministre au
regard des éléments de réponse que je viens de recevoir sur l'augmentation
substantielle de nos forces créent une contradiction extrêmement
inquiétante.
La situation en Afghanistan est en train de se détériorer
rapidement. Le ministre précise d'ailleurs, et cela me semble important, que
« la situation se dégrade et, avec le temps, les forces de l'OTAN
risquent d'apparaître comme une armée d'occupation ». J'avais lancé cet
avertissement voici quelques mois et c'est maintenant le ministre qui le
reconnaît. Comment comprendre alors que, dans le même temps, la Belgique
augmente ses forces en Afghanistan ?
Monsieur le Président, chers
collègues, je pense qu'il s'agit là d'un sujet extrêmement préoccupant dont la
commission de la Défense du Sénat devrait se saisir. Je rappelle qu'au moment
même où le Sénat américain s'oppose à la décision du président Bush de
renforcer les forces militaires en Irak, la Belgique décide d'accroître ses
forces en Afghanistan de manière plus importante encore et que cela se passe
dans un silence assourdissant. C'est inquiétant. Je vais donc demander aux
présidents des commissions de la Défense et de la Justice que nous examinions
en profondeur la politique de la Belgique en Afghanistan et l'évolution de
notre engagement militaire dans ce pays. J'espère que d'autres collègues me
suivront.